Synopsis : “Wonder Wheel croise les trajectoires de quatre personnages, dans l’effervescence du parc d’attraction de Coney Island, dans les années 50 : Ginny, ex-actrice lunatique reconvertie serveuse, Humpty, opérateur de manège marié à Ginny, Mickey, séduisant maître-nageur aspirant à devenir dramaturge et Carolina, fille de Humpty longtemps disparue de la circulation qui se réfugie chez son père pour fuir les gangsters à ses trousses. ”
Les lumières de la salle de cinéma s’allument, tu te repositionnes sur ton siège pour avoir fière allure parce que la position “je m’installe comme à la maison” ce n’est pas trop ça, et là, ton ami(e) se retourne vers toi et te pose la question fatidique…
Woody Allen nous propose son 47e long métrage annuel : Wonder Wheel. À chaque nouvelle production, on sait que l’on retrouve un univers familier : un scénario construit habilement, des textes ciselés sur fond de comédie ou de drame. Parfois Allen réussit à jumeler les deux genres comme le mélancolique Café Society. Une fantaisie sucrée et douce-amère qui avait enchantée la Croisette et les Festivaliers en mai 2016. Il aura fallu attendre une année et demie pour découvrir Wonder Wheel. Cette nouvelle réalisation est à la hauteur des attentes ?
La musique jazzy qui plait tant assure une ouverture habituelle dans une ambiance new-yorkaise très fifties. Mais pourtant, la magie n’opère pas totalement. Ce n’est pas le choix du drame qui pose problème. Au contraire, en axant le scénario sur une histoire d’amour, d’adultère et également de famille qui se retrouve, mais se dispute et se déchire, le réalisateur new-yorkais vise juste. Ces histoires se mêlent et se rencontrent avec une réelle fluidité. Et visuellement, le film est joli grâce au travail magnifique de la photographie. Vittorio Storaro joue des contrastes alternant cet orangé chaleureux au bleu froid et gris pour les deux personnages féminins. Le visage de Kate Winslet est auréolé d’orange quand Juno Temple est dans les bleutées. Ce système binaire simpliste renforce la tragédie grecque qui se joue. Mais il provoque aussi une lassitude, car les changements de couleur annoncent le bonheur ou le drame au point de ne plus créer de surprise.
Là est la difficulté de Wonder Wheel : l’absence de surprise ! Woody Allen a choisi de réaliser une tragédie grecque antique dont les tenants et les aboutissants sont prévisibles. Et nous devenons les spectateurs d’une pièce de théâtre trop attendue. D’un côté, on comprend mieux le jeu outrancier des acteurs, mais de l’autre, on est vite lassé. Même si les décors sont magnifiques, la magie de Coney Island ne fait que recopier tout ce que le réalisateur a déjà mis en image précédemment. Ici un plan de Café Society, là une attitude qui rappelle étrangement Cate Blanchett dans Blue Jasmine. Quant à l’arrivée de Juno Temple perdue, c’est un peu Whatever Works, sauf que c’était une comédie.
Malgré l’abattage des acteurs, tous excellents notamment en solo, le jeu quasi hystérique de Kate Winslet gâche le film. Elle en fait beaucoup trop. Et les atermoiements amoureux de Justin Timberlake poussent le spectateur à ne pas vouloir le suivre dans son choix cornélien. Malgré James Belushi et le jeune Jack Gore, hilarant en pyromane, le film patine sans cesse. L’histoire s’étire en longueur pour aboutir à une conclusion logique et sans saveur. Au point même de se retrouver comme à la fin du film Vous allez rencontrer un bel sombre inconnu: « tout ça pour ça » !
En résumé, cette cuvée « allenienne » est décevante malgré une photographie impeccable. La reconstitution du Coney Island des années 1950 est une réussite tant la prouesse digitale colle à la perfection aux choix visuels imposés par Vittorio Storaro sans que cela ne se voit. Mais en choisissant d’ancrer sa tragédie grecque auprès d’un quatuor amoureux qui ne sait qui choisir, le réalisateur semble figer sa mise en scène. Long et souvent hystérique, Wonder Wheel ennuie plus souvent qu’il ne passionne, un Allen en mode plus que mineur.
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