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Quelques mots, sur ces œuvres que nous découvrons depuis le Québec ou la France, sur notre écran d'ordinateur ou dans notre salle de cinéma favorite.

Tyler Rake (Extraction), la brute au grand cœur

Synopsis : « Tyler Rake est un mercenaire intrépide qui travaille dans l’ombre. Alors qu’il n’a plus rien à perdre, il est chargé par un puissant caïd mafieux, pour l’heure incarcéré, de sauver son fils qui a été enlevé. Mais dans le milieu glauque de la pègre, où se côtoient marchands d’armes et narcotrafiquants, la mission ultra-périlleuse de Rake frôle l’impossible. Et la vie du mercenaire et du jeune garçon risque d’en être bouleversée à jamais… »


Les lumières de la salle de cinéma s’allument, tu te repositionnes sur ton siège pour avoir fière allure parce que la position “je m’installe comme à la maison” ce n’est pas trop ça, et là, ton ami(e) se retourne vers toi et te pose la question fatidique…

Avant d’être les réalisateurs, visionnaires comme aiment le dire certains services de marketing, à qui l’on doit quelque’uns des plus gros succès au box office mondial avec notamment Avengers : Infinity War et End Game, Joe et Anthony Russo s’afféraient déjà aux romans graphiques. Non pas en tant que réalisateurs en charge d’adaptations, mais bel et bien en temps qu’auteurs. Et oui, Joe et Anthony Russo sont des auteurs, des auteurs de romans graphiques à qui l’on doit entre autres Ciudad, paru en décembre 2014 et illustré par Fernando León González. Entre deux productions Disney Marvel, il est donc peu surprenant de les voir s’afférer à la production de l’adaptation cinématographique de leur propre bébé. Que l’on aime ou non les productions Marvel, et plus particulièrement les films réalisés par les Frères Russo, il est difficile de ne pas concéder qu’ils sont de bons divertissements. Des films qui se ressemblent, des films qui ne sont peut-être pas originaux ou qui s’avèrent dénués d’âme pour x ou y raison, mais ils sont efficaces. Le spectateur est pris par la main afin de pouvoir avancer, séquence après séquence, avec fluidité et entrain. Une histoire qui va être faire-valoir, intégralement dédiée au bon enchaînement des scènes d’actions afin de ne pas concéder la moindre baisse de régime et que le spectateur ne puisse aucunement s’ennuyer ou baisser le regard. Ce sont les introductions de personnages ou les séquences nécessaires afin de rendre l’histoire un minimum cohérente qui vont permettre de nous rendre compte que la mise en scène manque de tact ou que la réalisation est en pilotage automatique. Mettre l’adaptation entre les mains d’un cinéaste étranger n’est donc pas la pire idée.

Surtout lorsque ce même étranger n’est autre que Sam Hargrave, coordonnateur de cascades pour les productions Disney Marvel, la saga Hunger Games, Warrior ou encore Atomic Blonde réalisé par un certain David Leitch. David Leitch, lui-même anciennement coordonnateur de cascades, entre autres pour les sœurs Wachowski, avant de devenir un réalisateur de renom et important pour le genre du cinéma d’action. Tel que le si bien connu John Wick nous l’avait prouvé lors de sa sortie en salles, avoir un metteur en scène qui a une certaine expérience du métier (de la coordination des combats en l’occurrence), inculque à l’oeuvre une cohérence inébranlable. Et à l’image de n’importe quel cinéaste, l’on assiste à la démonstration d’un metteur en scène qui n’emprunte pas le même style que celui ou celle auquel l’on aimerait le comparer avant toute chose. Si Chad Stahelski et David Leitch avaient insufflés en John Wick une volonté de créer un film d’action élégant, tant par la direction artistique que par les chorégraphies de combat, avec de longs enchaînements et des coups bien découpés tout en mélangeant les styles d’arts martiaux, afin d’avoir des combats complets sur la durée, Sam Hargrave rentre dans le lard. Brutal et bestial, sont les termes qui définissent parfaitement Tyler Rake, mercenaire psychologiquement aussi fiable qu’un soldat qui revient du front avec un chargeur dans le buste. Antithèse d’un John Wick sur le papier, il lui emprunte néanmoins l’efficacité radicale lors des phases de combat par une recherche de cohérence entre les chorégraphies et la réalisation. Ne pas accentuer le mouvement et l’intensité des combats par des mouvements de caméra ou un découpage particulier, mais simplement transmettre l’intensité des coups portés par le biais de la caméra. La caméra est là pour capter le moment, capter l’intensité de chaque impact et non le créer. La véracité de l’action et pourquoi pas, ajouter un mouvement surréaliste pour insuffler une dose de spectacle et de surréalisme pouvant être exploité comme un ressort comique.

Le désire primaire de voir un acteur charismatique et musculeux, d’être mis au service d’un film dont l’histoire est prétexte à une action brutale et bestiale. Si l’on pourrait aisément dire que ce Tyler Rake repose sur un scénario prévisible et peu intéressant, il semble bien plus intéressant d’en dire qu’il est prétexte. Prétexte à lancer une course poursuite intense au rythme effrénée en plein cœur de la ville de Mumbai en Inde. Une ville chaude et densément peuplée, dont se sert à merveille le réalisateur afin d’étoffer un film finalement pas si simpliste que cela. Un scénario ce n’est pas qu’une histoire, c’est aussi un background qui va servir à insuffler une crédibilité à l’action et donner une identité au film. Mumbai c’est une chaleur étouffante que l’on retrouve sur le visage tuméfié des personnages. Ce sont des rues étroites avec du trafic et des piétons qui se mélangent, donnant lieu à des courses poursuites et à des scènes de combats avec du monde autour. Un film dont les scènes d’action n’ont pas lieu dans un entrepôt désaffecté déshumanisé, mais bel et bien dans une ville qui a du caractère et qui grouille de vie. Ce qui nous donne un film qui a du corps, emprunt des conditions de la ville dans laquelle se déroule l’histoire. Un choix pas anodin, un choix qui vient texturer et densifier le film, toujours en cohérence avec la radicalité et la bestialité des combats. Tout apparaît comme rude, chaud, poussiéreux et difficile. À l’image de la bestialité des chorégraphies de combat imaginés par le cinéaste Sam Hargrave.

Un cinéaste qui met la main à la pâte, qui signe un premier long-métrage aussi bestial et jouissif que fourre tout. À l’image de n’importe quel réalisateur qui signe un premier long-métrage, Sam Hargrave cèdent à des envies fondamentalement peu pertinentes. Est-ce que créer un plan séquence de 15 minutes qui mélange à la fois course poursuite, fusillades et combat rapproché est pertinent pour le film ? Non, car c’est le plan-séquence qui par moment, dicte la mise en scène (afin de permettre les coupures s’agissant d’un faux plan-séquence), entachant la lisibilité de l’action, notamment en voiture, alors que le reste du film est d’une parfaite compréhension. Néanmoins, Sam Hargrave fait preuve d’intelligence au sein même de ce plan séquence en multipliant les points de vues afin que la proie devienne chasseur et inversement. Tyler Rake n’en demeure pas moins un film d’action remarquablement mené, porté par la précision d’une réalisation qui fait sens vis-à-vis des chorégraphies de combat. À ne pas occulter la très belle prestation de l’acteur Chris Hemsworth qui se donne et demeure convaincant d’un pan à l’autre de l’histoire. Un personnage peu intéressant, mais une prestation peu facile à exécuter tant il lui faut rester en condition physique sur chaque plan tout en sachant qu’un film n’est évidement pas toujours tourné dans l’ordre chronologique et que l’on parle de plusieurs semaines de tournage consécutives.


Actuellement disponible sur Netflix

« Brutal, bestial et jubilatoire grâce à une parfaite maîtrise de son art, qu’il est bon de voir Chris Hemsworth se donner corps et âme afin de parfaire l’intensité du film. »


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