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[Sortie DVD] It Follows de David Robert Mitchell

It-Follows

« Après une expérience sexuelle apparemment anodine, Jay se retrouve confrontée à d’étranges visions et l’inextricable impression que quelqu’un, ou quelque chose, la suit. Face à cette malédiction, Jay et ses amis doivent trouver une échappatoire aux horreurs qui ne semblent jamais loin derrière… »

Sortie en février dernier dans nos salles, accompagné d’un buzz surprenant, d’un excellent bouche-à-oreille et d’une réputation d’ovni acquise en festival, It Follows sort aujourd’hui en DVD. Et même si @kev44600 en avait vanté les mérites par ici à l’occasion de sa sortie en salles, le manque flagrant de contenu bonus sur le DVD qui nous est parvenu nous empêche d’écrire un article conséquent dessus, et ainsi c’est donc moi qui vais m’attarder quelques lignes sur le dernier hit critique horrifique en date.

It Follows n’est pas un mauvais film. Voilà, c’est dit, et je le pense. Je pense aussi que ce n’est pas un chef-d’œuvre. C’est un film correct, avec ses défauts, mais aussi de nombreuses qualités, mais qui n’atteint pas les strates qualitatives supérieures. Le principal problème d’It Follows est de sortir à notre époque, où les plus mauvais films d’horreur divertissent le plus, et où ils semblent ainsi être les moins oubliés. It Follows n’est pas le genre de films d’horreur débiles qui vont se regarder entre amis autour d’une pizza, et c’est probablement pour cela qu’il ne rencontre pas le grand public. Et ce n’est également pas un chef-d’œuvre, ce qui rendra difficile son accession au panthéon des films d’horreur culte. Et pour autant, il serait dommage d’oublier ce film qui, malgré ses défauts, réussit ce qu’il entreprend la plupart du temps.

It Follows, c’est une histoire de métaphore. Sexuelle au premier abord, mais aussi nombreuses sur la jeunesse et le passage à l’âge adulte. C’est donc l’histoire d’une jeune adulte qui, après avoir couché avec son copain, va se rendre compte qu’elle est poursuivie par une chose, une entité, qui veut sa mort à tout prix. It Follows donc. But what is IT? C’est une des questions qui parcourent ce film. Que représente cette chose exactement? Si beaucoup ont fait le rapprochement avec une métaphore sur les IST, et notamment le SIDA, cette interprétation paraît très simpliste et premier degré, tant cette métaphore est évidente, mais pas unique.

En effet, cette chose semble représenter aussi le passage à l’âge adulte, et le destin. La chose du film est inarrêtable, effrayante et il semble totalement impossible de lui échapper, c’est le boogeyman ultime, cette figure de film d’horreur instauré par John Carpenter avec son premier Halloween, et son tueur invincible, Michael Myers. Ici, on est face à la quintessence de ce BoogeyMan, car la chose, qui prend l’apparence de n’importe qui, ne s’arrête jamais, ne peut pas être tuée, et peut arriver de n’importe où (idée assez brillante qui permet d’instaurer une tension absolument permanente). Et de ces caractéristiques naissent de nombreuses métaphores. Celle du passage, forcément effrayant, de l’adolescence à l’âge adulte, mais celle du destin également, le destin ou du karma qui prend n’importe quelle forme pour faire advenir n’importe quoi.

Ce fut d’ailleurs un argument d’une des critiques les plus récurrentes faites à la sortie du film. Le film fut accusé de mettre en scène des adolescents punis pour avoir couché, et donc d’être d’un puritanisme total, ce qui est, à mon sens, une erreur de jugement vis-à-vis du film, qui ne se permet jamais de juger ses personnages, ni leurs actions et au contraire, montre des jeunes combatifs, jamais impuissants face à la cruauté de ce qui leur est infligé. L’acte sexuel a beau être le déclencheur de ce drame, il fait partie des métaphores qui nervent l’œuvre, qu’il serait inexact de qualifier de puritaine.

Mais It Follows est avant tout un film d’horreur, dans la droite lignée des maîtres du genre, tel John Carpenter, cité plus haut. BoogeyMan, horreur qui naît souvent la nuit ou encore utilisation d’une musique électro non seulement excellente, mais rythmée et poseuse d’ambiance en quelques secondes seulement (les respirations du film se situent d’ailleurs dans l’utilisation de cette électro lancinante au milieu de paysages américains qui défilent à toute vitesse, ou sont au contraire filmés de manière presque contemplative), l’ombre de Carpenter règne. Pour autant, on a jamais l’impression de voir un plagiat des classiques, comme trop souvent actuellement. Certes le film n’est pas le plus original qui soit, mais rien que son pitch le place en marge des productions horrifiques actuelles, sensation que sa réalisation ne fait que confirmer.

Effectivement, la réalisation et la mise en scène du film, privilégiant la sobriété plutôt que la multiplication d’effets grotesques. Ainsi, l’ouverture du film s’avère d’une redoutable efficacité, tout comme les diverses séquences horrifiques que le film met en place qui, avec de simples plans larges ou contrechamps arrivent à nous angoisser profondément. La grande force du film est aussi de nous plonger dans un état de malaise profond, car l’on sait que l’horreur peut surgir n’importe quand. On observe aussi une gradation dans l’horreur, le film arrive à se renouveler, et à faire preuve de beaucoup d’efficacité grâce justement à ce renouvellement de ses effets horrifiques.

It Follows n’est pas non plus dénué de défauts, avec quelques personnages au développement incertain, des passages à vide, des métaphores parfois trop lourdes, une utilisation de l’horreur quasi exclusivement nocturne et un schéma trop usité en matière de films d’horreur. Mais il est tiré vers le haut par toutes les qualités précédemment citées, mais aussi par une poésie qui naît aux instants les plus inattendus du film, et un dernier plan brillant.

Ardoise

Il est donc clairement regrettable qu’il n’y ai absolument aucun bonus sur le dvd du film. Pas de making-of ni de commentaires audio, rien. C’est d’autant plus décevant que le film méritait franchement des bonus fournis. Par à côté, l’édition Blu-Ray du film comporte un livret et pour la première fois en haute définition, le premier film de David Robert Mitchell. Une bonne initiative, mais qui ne remplace pas de simples bonus permettant d’en savoir plus sur la création du film. En espérant que ce It Follows arrive à traverser les âges, et peut-être un jour bénéficie d’une sortie à sa hauteur.

 

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