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Quelques mots, sur ces œuvres que nous découvrons depuis le Québec ou la France, sur notre écran d'ordinateur ou dans notre salle de cinéma favorite.

One Movie One Shot | #1 Kong: Skull Island réalisé par Jordan Vogt-Roberts

Synopsis: « Un groupe d’explorateurs plus différents les uns que les autres s’aventurent au cœur d’une île inconnue du Pacifique, aussi belle que dangereuse. Ils ne savent pas encore qu’ils viennent de pénétrer sur le territoire de Kong… »

One Movie One Shot, le concept ? Parlons cinéma en toute décontraction et parlons image par le biais d’un Perfect Shot qui me semble intéressant, beau et surtout évocateur, alors que le film dont il est extrait ne dispose pas du scénario le plus élaboré au monde. Et si la Politique des Auteurs disaient vrai ?

– Réalisateur: Jordan Vogt-Roberts
– Directeur de la Photographie: Larry Fong
– Compositeur: Henry Jackman
– Casting:  Tom Hiddleston, Samuel L. Jackson, Brie Larson, John C. Reilly, John Goodman, Corey Hawkins…
– Distributeur: Warner Bros. Pictures (International)
– Sociétés en charge des SFX: Industrial Light & Magic (Superviseur : Jeff White), Hybride (Superviseur: Philippe Theroux) et Shade VFX (Superviseur : Mitchell S. Drain)
– Budget: $185,000,000
– Ratio: 2.39 : 1
– Negative Format: Codex ARRIRAW (3.4K)

« La critique est aisée, mais l’art est difficile ». Je ne suis pas un grand amateur de théâtre ou encore moins de belles tirades exclamées par d’anciens membres de l’Académie française, mais il faut avouer que Philippe Néricault, aussi nommé Destouches, avait parfaitement vu juste. Vous, moi, nous, et quelques soit le public dont nous faisons partie (cinéphiles, spectateurs du dimanche, amateur de cinéma indépendant ou de blockbusters spectaculaires…), avons le droit et même le devoir de donner notre avis sur chacune des œuvres cinématographiques qu’il nous est donné de voir. Des films que l’on va aimer ou tout au contraire, que l’on va détester. Chacun possède sa propre culture (sa propre éducation pour utiliser un terme pus explicite qui en revient au même) et chacun possède sa propre personnalité qui va déterminer ses goûts cinématographiques. Et s’il est facile d’employer des qualificatifs comme « chef-d’œuvre » ou « une merde », il semble plus complexe d’aller au-delà de ces derniers. Mais il n’en est finalement rien. Au-delà de l’expression « tous les goûts sont dans la nature », qui n’est en aucun cas fausse, mais est avant tout utilisée par celles et ceux qui ne cherchent pas les arguments pour déterminer pourquoi telle œuvre l’a marquée plus qu’un autre (une façon de botter en touche et de fuir la discussion plus simplement), il est logique de déterminer pourquoi un film nous plaît ou non.

À ce niveau là de l’article vous vous dites bien: « où veut-il en venir et quand va-t-il nous parler du film mentionné par le titre de l’article ? ». Au travers de ce concept en rien novateur ou original, j’ai envie d’aller à l’encontre de l’image que peut posséder un film. Image souvent affublée à une œuvre cinématographique grâce ou à cause d’une opinion majoritaire sur cette dernière, et ce, de la part de critiques, blogueurs et des spectateurs en règle générale. Une image qui n’est pas toujours fausse, bien au contraire, mais qui n’est pas pour autant à prendre d’un point de vue général. Film à l’histoire simpliste porté par des personnages qui reposent sur des archétypes déjà bien préétablis dans le genre en question, Kong: Skull Island n’est pas un film qui va vous tordre les neurones. Mais était-ce la volonté de son metteur en scène Jordan Vogt-Roberts ? Si je ne l’ai pas rencontré et n’ai eu personnellement son avis sur la question, ce que je connais de lui par le biais d’interview, de ce qu’il publie sur les réseaux sociaux ou encore par le prisme de son film, me permet d’affirmer que non. Kong: Skull Island assume son statut de film pop-corn spectaculaire, explosif et généreux dans ses compositions picturales. Jordan Vogt-Roberts s’amuse, héroïse par ses cadrages et entrées de champ son protagoniste (Kong NDLR) et utilise les moyens mis à disposition par le cinéma pour faire en sorte que le spectateur en prenne plein la vue, s’amuse et reparte la tête remplie de Perfect Shot.

Un Perfect Shot est un beau plan, mais au-delà de sa beauté plastique, c’est un plan qui va raconter quelque chose grâce à sa composition. Placement des personnages, choix de la focale, choix du mouvement ou non, choix de(s) couleur(s), framerate… Des détails qui peuvent paraître anodins pris un à un, mais qui bien étudiés et pris en compte par l’équipe technique (réalisateur, chef opérateur, assistant au cadre…) donnent à un plan une signification plus ou moins limpide, plus ou moins complexe à déterminer. Attention à ne pas confondre avec le Money Shot qui est le plan majeur du film également, mais qui par définition sera le plan le plus onéreux de la production. Le plan dont vous vous souvenez, mais qui n’est pas pour autant le plus important, évocateur et intéressant. Prendre Kong: Skull Island en premier film est pour moi une éventualité puisqu’il s’agit d’un blockbuster accessible, qui mise avant tout sur son visuel et qui a à sa tête un jeune cinéaste qui sait pourquoi il prend telle ou telle initiative. Si c’est le beau et le spectaculaire qui priment, subsiste pour moi un Perfect Shot qui n’est en aucun cas un des Money Shot dont regorge le film.


Le Perfect Shot en question du film Kong: Skull Island

Ce dernier intervient alors que le capitaine James Conrad (Tom Hiddleston) et Mason Weaver (Brie Larson) font la rencontre de Hank Marlow (John C. Reilly). Ce dernier, déjà sur l’île depuis plusieurs années, va leur raconter la légende de Kong, ce que représente ce dernier pour le peuple vivant sur Skull Island. Si à ce moment, afin d’amplifier les propos par l’image et de donner une tout autre dimension à Kong, Jordan Vogt-Roberts aurait pu utiliser des flashbacks ou plans usant d’une palette graphique bien distingués du reste du film, il va se contenter de rester dans la caverne et montrer Kong, développer son histoire par le biais d’utilisation de l’Art Pariétal. L’art pariétal représente l’art réalisé sur les parois de grottes, pour faire vite et simple.

Au-delà de la simple référence histoire et de la créativité dont fait preuve Jordan Vogt-Roberts en usant de cet art au lieu d’une fioriture numérique, c’est un beau moyen pour lier deux formes d’arts en une, à savoir le cinéma et l’art contemporain. Ces mêmes peintures rupestres sont réalisées sur plusieurs surfaces bien distinctes et détachées les unes des autres, qui suivant un point précis dans l’espace choisi au préalable par l’artiste, vont ne faire qu’une et donner forme à une représentation, un dessin ou une forme. En l’occurrence, toutes les traces de peinture blanche réalisées sur les roches, vont par le biais d’un travelling et d’un panoramique droit/gauche de la caméra, se lier et former la représentation de Kong. Ce que l’on nomme: l’Anamorphose. D’autres peintures sont également présentées au cours de cette même séquence.

Un concept artistique qui ne date pas d’aujourd’hui, mais qui a été remis au goût du jour par le biais d’artistes contemporain et de plasticiens tels que Georges Rousse (lien vers son portfolio). Si vous ne connaissez pas, n’hésitez pas à regarder quelques-unes de ses œuvres. La façon dont il s’octroie l’environnement de création est superbe et très intéressante à découvrir, pour au final réaliser une œuvre en trois dimensions. Avec cette séquence et ce Perfect Shot, Jordan Vogt-Roberts lie plusieurs types d’arts ensemble et va littéralement donner vie à une représentation picturale avec le mouvement de sa caméra. Un mouvement (et un placement de la caméra, une focale, tous deux choisi précisément pour adopter l’angle nécessaire) donc pensé et établi en fonction d’un sujet immobile.

Un plan qui paraît anodin dans le film, mais qui en dit long sur le maniérisme dont fait preuve le cinéaste afin que son film soit spectaculaire, beau, mais aussi intéressant à suivre grâce à quelques concepts artistiques comme celui-ci. Parce qu’au-delà de l’anamorphose, l’art pariétal permet d’inculquer à Kong la dimension historique qui va avec, de faire comprendre qu’il est une légende, une créature qui à l’image des dinosaures (rapport à Godzilla…) a une histoire, une prestance et une importance. Comme quoi, même dans un pur film pop-corn assumé comme celui-ci, subsiste une certaine recherche dans la construction de certains plans. Jordan Vogt-Roberts a de la suite dans les idées et se révèle être un auteur parmi tant d’autres et un non un simple Yes Man dans les mains d’Hollywood. Pour ce premier numéro, l’évidence et une première entrée en matière en guise d’introduction. La semaine prochaine on entrera un peu plus dans l’analyse avec très certainement un Perfect Shot qui nous permettra de développer la question des accords chromatiques.


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