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Legend (Critique | 2016) réalisé par Brian Helgeland

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Synopsis : « Londres, les années 60. Les jumeaux Reggie et Ronnie Kray, célèbres gangsters du Royaume-Uni, règnent en maîtres sur la capitale anglaise. À la tête d’une mafia impitoyable, leur influence paraît sans limites. Pourtant, lorsque la femme de Reggie incite son mari à s’éloigner du business, la chute des frères Kray semble inévitable… »

Brian Helgeland est un nom qui ne dit rien à personne, ou presque. Néanmoins, il s’agit d’un cinéaste américain à double casquette, qui a déjà une filmographie conséquente. Il a débuté sa carrière en 1988 en tant que scénariste du quatrième opus de la saga Freddy, intitulé Le Cauchemar de Freddy. Par la suite, il a rédigé les scénarios de divertissements américains tels que Assassins avec Sylvester Stallone ou encore Complots avec Mel Gibson et Julia Roberts. Ce n’est qu’en 1998 qu’il passa pour la première fois derrière la caméra en réalisant un thriller sombre et très violent avec Mel Gibson dans le rôle-titre. Il s’agissait de l’excellent Payback. Cependant pour une première réalisation, tout n’a pas été rose pour Brian Helgeland. La société de production majeure et ayant les droits de distribution du film, Warner Bros, mécontente du film à cause de son extrême violence a tout simplement fait virer le réalisateur une fois le tournage achevé. D’après les diverses rumeurs, c’est entre 1/5 et 30% du film qui ont subits des reshoot sous la houlette de Mel Gibson. Ce dernier avait déclaré que ce n’était pas lui, mais bien le chef décorateur John Myhre qui était passé derrière la caméra. On a du mal à le croire sachant que l’une des sociétés en charge de la production du film n’était autre que Icon, la société de production de Mel Gibson. Tout ça pour dire que Brian Helgeland n’avait pas débuté sa carrière de metteur en scène de la plus belle des manières. Cependant, il a tout de même à son actif les scénarios de films comme L.A. ConfidentialMan on Fire, Green Zone ou encore Créance de Sang et Mystic River. Rien que ça. En 2016, il repasse derrière la caméra pour une cinquième fois, avec un projet ambitieux. Un biopic consacré aux frères jumeaux Kray, « légendes » de la mafia londonienne. Le film de la rédemption à l’international pour Brian Helgeland ? Pas si sûr…

Avant d’être un biopic sur les frères Kray, Legend c’est LE film vendu sur la prestation de Tom Hardy. Que dis-je, la double prestation de Tom Hardy. Ce dernier est un très bon acteur et interprète. Il nous l’a déjà prouvé à de multiples reprises avec des films comme : Warrior, Des Hommes sans Loi, Enfant 44, Bronson ou encore le trop méconnu Locke. Des films dans lesquels il réussissait à nous faire oublier l’acteur afin de devenir Bronson ou encore l’un des Frères Bondurant dans le film réalisé par John Hillcoat. Avec Legend, son travail était doublement plus compliqué. Il lui fallait réussir à faire oublier aux spectateurs Tom Hardy avec deux interprétations impressionnantes, mais également qu’il endossait non pas un, mais deux rôles. Deux personnages, deux interprétations totalement différentes. Tom Hardy nous démontre avec force qu’il sait se mouvoir dans le costume d’un personnage afin de lui donner vie. Il donne à ce personnage une intensité et une émotivité indéniable. Dans Legend, il réussit à donner vie aux deux personnages, à faire en sorte qu’ils soient indéniablement différents. L’un des deux frères est légèrement grimé afin que la différenciation soit encore plus simple pour le spectateur. Ce qui n’est pas un défaut en soi, mais on comprend rapidement que les personnages ne sont pas suffisamment intéressants, et plus particulièrement bien écrits et mis en scène, pour tenir en haleine les spectateurs sur près de deux heures de film. Chacun à leur tour, les deux frères vont avoir leur moment de gloire, le moment où sera mis au centre du cadre les problèmes de l’un ou de l’autre. Ils vont nous décocher quelques sourires et pourraient même tenter d’émouvoir ou de terrifier, sauf que ce n’est pas le cas.

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La caméra observe Reggie et Ronnie Kray. Mets en lumière leurs tourments psychologiques, leurs vies sentimentales respectives et leur business commun au sein de la mafia londonienne, mais ne les juge à aucun moment. À aucun moment, le scénario, conçu par celui qui est également réalisateur, Brian Helgeland, ne va orienter son histoire à partir d’un point de vue. Axé l’histoire à partir du point de vue du personnage féminin principal, incarné par Emily Browning aurait été une bonne idée. Une idée afin de permettre à la mise en scène de sortir de son carcan insipide de simple biopic et de proposer à ce personnage d’être plus qu’un simple faire-valoir. Un personnage féminin qui n’a jamais son mot à dire, soumise par amour à Reggie Kray. Le véritable problème du film Legend est de n’être qu’un simple biopic qui cherche à mettre en lumière deux frères incarnés par un même acteur. Mettre en lumière le talent d’un acteur qui n’a plus rien à prouver. Un film qui ne surprend donc pas et agace par sa simplicité scénaristique. Legend conte aux spectateurs l’histoire des Frères Kray, de leur arrogance et de leur volonté de conquérir la ville de Londres. Le scénario de ce long-métrage se concentre uniquement sur ces deux personnages, délaissant totalement ce qui les englobe. La ville de Londres, l’aspect sombre et violent de la mafia londonienne, les personnages secondaires qui vivent au cœur ou voient de l’extérieur toute cette mafia vivre et se démultiplier autour d’eux… Tout ce qui aurait servi à contextualiser l’action et à offrir un background intéressant au film est relayé à l’arrière-plan, voire inexistant. Ce ne sont pas les quelques lignes dialogues pauvres en contenu, déclamées par les personnages secondaires qui vont permettre à ses derniers d’être plus que de simples faire-valoir.

Malgré un scénario très mal écrit, qui a aucun moment ne va s’émanciper des Frères Kray, Legend est un film qui peut être visionné tel un divertissement du dimanche soir. Sur le plan technique, Brian Helgeland et son équipe, on fait un beau travail. Les jeux de lumière sont soignés, les mouvements de caméra sont stables, les cadres sont beaux et savent toujours comment mettre en valeur Tom Hardy afin de rendre sa double prestation plus impressionnante. Jonglant entre la comédie et le drame, dans le but de rendre les protagonistes plus attachants ou de tout simplement divertir, le film ne réussit jamais à trouver son juste milieu. La direction artistique colorée et lumineuse permet au film d’avoir une belle imagerie et d’embellir le divertissement qu’il est, mais discrédite sa dramaturgie et la noirceur sensée émanée des personnages ou du background. Deux mafieux qui évoluent dans un monde où tout n’est que luxure et beauté. Les rues sont propres, les pubs accueillants, il fait toujours bon vivre dans ce monde utopique où la pluie ne s’abat que lorsque les protagonistes sombre dans la démence la plus totale.


En Conclusion :

Legend, un film techniquement réussi, mais dans lequel ne subsiste aucune harmonie entre l’histoire, aussi suffisante et simpliste soit-elle, et sa technique. Ce long-métrage est avant tout le film avec Tom Hardy. Le film dans lequel il faut sublimer la performance de l’acteur par la technique et la mise en scène. La bande sonore, laborieuse, omniprésente et qui ne laisse à aucun moment place au silence ou à des compositions apaisées afin de laisser place à l’émotion, ainsi que cette belle imagerie chatoyante, forment tous deux un bel écrin. Un emballage de bon facture, afin de mieux faire oublier un scénario rachitique qui ne trouve aucun point de vue et se contente de raconter l’histoire des Frères Kray sans prendre position ou chercher à donner vie à un background. Tom Hardy est un très bon acteur, mais il n’a plus rien à nous prouver. Malheureusement, il ne peut sauver ce film à lui seul. Le drame de sa première réalisation, jugée trop violente par les producteurs, semble avoir laissé des séquelles à Brian Helgeland qui n’ose plus rentrer dans le vif du sujet et se contente de faire du divertissement conventionnel et sans saveur.


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