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Quelques mots, sur ces œuvres que nous découvrons depuis le Québec ou la France, sur notre écran d'ordinateur ou dans notre salle de cinéma favorite.

Tully réalisé par Jason Reitman [Sortie de Séance Cinéma]

Synopsis : “Dans la quarantaine, Marlo, mariée et mère de deux enfants, est sur le point de mettre au monde un troisième bébé. Elle est complètement dépassée par les tâches du quotidien et ne sait pas comment s’en sortir. Son frère lui recommande alors d’engager une nounou de nuit pour prendre soin de son nouveau-né quand elle sera assoupie. D’abord réticente à l’idée, Marlo finit par se rendre à l’évidence : elle n’y arrivera pas sans aide. Elle engage donc Tully, une jeune femme frivole et dégourdie, pour prendre soin de son bébé le soir venu. Marlo et Tully développent une forte relation d’amitié qui transformera le quotidien de la maman surmenée.”


Les lumières de la salle de cinéma s’allument, tu te repositionnes sur ton siège pour avoir fière allure parce que la position “je m’installe comme à la maison” ce n’est pas trop ça, et là, ton ami(e) se retourne vers toi et te pose la question fatidique…

Lorsqu’on entend ou que l’on écrit le nom d’un.e cinéaste, il nous vient immédiatement des titres et des images. Chaque cinéaste nous ramène à une impression, une émotion particulière ou encore un genre cinématographique dans lequel il pourrait être enfermé. Plus ou moins volontairement. Jason Reitman est en ce sens un réalisateur atypique puisqu’il nous inspire à la fois des films profondément humains et aux personnages attachants, mais également le pire du cinéma du cinéma romantique moderne. Si « Juno » et « Up In The Air » sont de très beaux films, car bien écrits et à aucun moment hautains ou caricaturaux dans leurs façons de développer leurs personnages ainsi que la société dans laquelle ils évoluent, le film « Men, Women & Children » est l’antithèse même des premiers cités. Caricatural à souhait, usant de stéréotypes et prétentieux dans sa façon de mettre en parallèle l’avancée technologique et les jeunes adultes qui en usent et abusent, ce film a laissé une sensation amère qui a entachée l’image du cinéaste américain. Young Adult, assez mal écrit et bien trop pauvre en enjeux dramatiques, n’a en rien aidé à faire remonter notre estime envers Jason Reitman. Quatre ans après, le voici de retour aux côtés de Charlize Theron afin d’aborder une nouvelle fois le thème de la maternité. Néanmoins, à en lire le synopsis, Jason Reitman semble avoir muri, bien décidé à mettre sa propre expérience humaine au sein d’un film thématiquement dans la veine de ses précédentes réalisations tout en abordant cette fois le point de vue d’une femme adulte et non d’une jeune adulte.

« Charlize Theron, nouvelle muse de Jason Reitman pour le meilleur et… uniquement le meilleur »

Et si la crise de la quarantaine avait permis au cinéaste Jason Reitman de comprendre le monde qui l’entoure ? Aborder un monde et une génération qui n’est pas la sienne ne lui avait dernièrement, pas réussi. Du haut de ses quarante ans, le cinéaste aborde ici la crise de la quarantaine par le prisme de Marlot (incarnée par Charize Theron), femme mariée, mère de deux enfants et enceinte d’un troisième. Une femme au bord de l’implosion, aussi bien physiquement que mentalement, mais qui n’a cependant pas envie de déléguer la tâche qui est la sienne : s’occuper des siens. Elle prend sur elle, se contrôle et de cette manière, le scénario peut se permettre de caractériser très rapidement ce personnage qui sera de toutes les séquences et de tous les plans. Utiliser dans un premier temps l’humour, et créer une empathie envers ce personnage au bord de l’implosion afin de mettre en place un lien entre elle et le spectateur.

Superbement dirigée, Charlize Theron porte sur ses épaules la charge que représente le film, représentée physiquement à l’image par ses enfants qu’elle traîne littéralement ainsi que son ventre de grossesse. Elle est drôle, touchante et d’une justesse rare, réussissant l’exploit de rendre sa situation crédible très rapidement afin d’entraîner le spectateur à ses côtés sans perdre de temps. L’arrivée de Tully (incarnée par Mackenzie Davis) en seconde partie de film sera donc un soulagement, tant pour Marlot, que pour le spectateur qui va faire face à l’arrivée d’une nouvelle dynamique créée par ce nouveau personnage. Ce vent de fraîcheur, porteur d’une remise en question ainsi que d’une envie de nouveautés, permet au film de ne pas céder à une laborieuse redondance, mais au contraire de continuer progressivement à gagner en dynamisme et en intérêts. Ce qu’elle apporte au personnage, Tully l’apporte au film et par déduction, aux spectateurs.

S’il est fondamentalement un film sur la crise de la quarantaine tel qu’il en existe déjà pléthore, Tully sort du lot et convainc grâce à son humanité, ainsi qu’à cette faculté de lier avec une remarquable fluidité moments dramatiques et de comédie pure. Là où ses précédentes réalisations reposaient majoritairement sur la mélancolie et l’aspect dramatique des moments, Tully se révèle être le film le plus drôle du cinéaste. Volontairement drôle. Grâce à un personnage immédiatement  caractérisé comme étant « au bout du rouleau »  Jason Reitman s’en donne à cœur joie et pousse le curseur de la comédie. Marlot se moque d’elle-même, se moque de sa situation avec exaspération. Totalement en empathie avec le personnage, le spectateur se retrouve à rire avec elle, à rire de ses propos sans jamais se moquer d’elle. Et ce, essentiellement grâce à une justesse trouvée à l’écriture, mais également dans la direction de l’actrice. Charlize Theron, nouvelle muse de Jason Reitman pour le meilleur et… uniquement le meilleur, dont le duo avec la jeune Mackenzie Davis fonctionne superbement. Deux actrices de talent dont les personnages sont complémentaires et nécessaires l’un à l’autre. Peu de simples faire-valoir dans l’utilisation des personnages secondaires, pour ne pas dire aucun, ce qui est à la fois surprenant et agréable vis-à-vis des précédentes réalisations du cinéaste.

Vous l’aurez compris, si on y allait à reculons à cause de précédentes réalisations médiocres, Jason Reitman a su nous cueillir avec ce très beau Tully. S’il n’est foncièrement que peu original dans ce qu’il raconte, il arrive à l’être grâce à une forme qui met l’accent sur l’humanité du personnage principal. Elle est drôle, touchante et attachante, remarquablement interprétée par une Charlize Theron tout aussi capable de séduire, de tuer à tour de bras, et d’incarner une mère de famille au bord de l’implosion. Actrice complète qui porte fièrement un film qui ne porte pas son nom.


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