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Quelques mots, sur ces œuvres que nous découvrons depuis le Québec ou la France, sur notre écran d'ordinateur ou dans notre salle de cinéma favorite.

The Climb, le bijou tragicomique US de l’année

Synopsis : « Kyle et Mike sont deux meilleurs amis aux tempéraments très différents mais dont l’amitié a toujours résisté aux épreuves de la vie. Jusqu’au jour où Mike couche avec la fiancée de Kyle… Alors que l’amitié qui les lie aurait dû être irrémédiablement rompue, un événement dramatique va les réunir à nouveau. »


Les lumières de la salle de cinéma s’allument, tu te repositionnes sur ton siège pour avoir fière allure parce que la position “je m’installe comme à la maison” ce n’est pas trop ça, et là, ton ami(e) se retourne vers toi et te pose la question fatidique…

Prix du jury au Festival du Cinéma Américain de Deauville 2019, coup de cœur du jury dans la catégorie « Un Certain Regard » au Festival de Cannes 2019, The Climb est le premier long-métrage du cinéaste-acteur Michael Angelo Covino. Film qu’il a écrit et dans lequel il joue avec son ami Kyle Marvin et adapté du court-métrage du même nom, sélectionné au Festival de Sundance.

Le court-métrage The Climb est avant tout un sketch, un gag dont le ressort comique repose sur un dialogue entre deux amis, le cinéaste étant persuadé que les meilleurs courts-métrages sont ceux qui reposent sur une idée très bien mise en scène, concise, simple, qui ne dépasse jamais dix minutes, selon ses mots. The Climb est donc né de ce postulat de départ avant de devenir un long-métrage. Succession de fragments de vies, filmés en plan-séquence, il relate une histoire d’amitié toxique entre deux amis sur plusieurs années. 

The Climb débute avec un long plan-séquence d’ouverture voué à devenir culte. Il met en scène deux amis en pleine balade à vélo sur une petite route dans le sud de la France. La scène s’ouvre sur une conversation amicale qui se transforme soudainement en dispute lorsque Mike (Michael Angelo Covino) révèle à Kyle (Kyle Marvin) avoir eu une liaison avec la fiancée de ce dernier qu’il est sur le point d’épouser. Le dispositif de mise en scène, une caméra qui suit, à la fois de loin et de près, les mouvements de ces personnages à vélos, allié à la liberté de jeu de ses comédiens, donne une séquence d’une drôlerie absolue, sur une situation pourtant terrible, annonçant le ton tragicomique du long-métrage. 

La particularité de The Climb est d’être découpé sous la forme d’une narration chapitrée. Le long-métrage devient alors un « film à sketchs » où se succèdent des saynètes en plan-séquence, avec des ellipses de plusieurs saisons, voire d’années hors-champs, où le cinéaste fait confiance à l’intelligence de son spectateur pour comprendre en quelques minutes ce qu’il s’est passé durant ses intervalles. Une utilisation du plan-séquence assez théâtrale et stylisée, où Michael Angelo Covino fait preuve d’une grande minutie dans la chorégraphie de sa caméra, le cinéaste revendique une volonté de justifier chaque mouvement d’appareil dans son récit, tout en laissant place à la fois au jeu d’acteurs de ses comédiens et à la virtuosité technique de sa mise en scène.

Car oui, si The Climb sent parfois un peu trop le « film à sketchs » dans son découpage et sa construction narrative, on peut vraiment parler de virtuosité technique en ce qui concerne la chorégraphie et la mise en scène de ses fragments de montage. La caméra se balade dans une maison, de pièce en pièce, pour capter deux dialogues différents à l’écran, suit la trajectoire d’un personnage au sein d’une fête de Noël : il filme la séquence de l’extérieur, capture plusieurs moments de vies à travers les fenêtres d’une maison, une ellipse entre deux saisons a lieu dans un faux plan-séquence avec un raccord invisible dans le plan, etc. Le long plan-séquence sert aussi parfois à capturer un dialogue entre ses deux personnages sur la durée, pour laisser place au jeu authentique de ses acteurs, dont l’amitié toxique est relatée avec une vraie subtilité dans l’écriture qui justifie constamment la virtuosité de son dispositif. 

On pourrait reprocher à The Climb la répétitivité de sa narration, reposant sur un bout à bout de saynètes, chacune virtuose et maîtrisée pris à part, mais qui ne détonne pas dans leur ensemble. Le premier film de Michael Angelo Covino n’en reste pas moins un bijou de drôlerie mélancolique, dans la veine tragicomique du Thunder Road de Jim Cummings, grand prix du jury de Deauville en 2018. Une continuité qui confirme la naissance d’une nouvelle vague d’auteurs dans le paysage du cinéma indépendant américain actuel.   


« Premier long métrage d’un cinéaste tragicomique américain prometteur, The Climb parvient à allier la virtuosité technique de sa mise en scène et l’écriture subtile de sa bromance toxique pour délivrer un bijou de drôlerie mélancolique.  »

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