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The Assassin (Critique |2016) réalisé par Hou Hao Yin

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Synopsis : « Chine, IX siècle. Nie Yinniang revient dans sa famille après de longues années d’exil.  Son éducation a été confiée à une nonne qui l’a initiée dans le plus grand secret aux arts martiaux. Véritable justicière, sa mission est d’éliminer les tyrans. A son retour, sa mère lui remet un morceau de jade, symbole du maintien de la paix entre la cour impériale et la province de Weibo, mais aussi de son mariage avorté avec son cousin Tian Ji’an. Fragilisé par les rebellions, l’Empereur  a tenté de reprendre le contrôle en s’organisant en régions militaires, mais les gouverneurs essayent désormais de les soustraire à son autorité. Devenu gouverneur de la province de Weibo, Tian Ji’an décide de le défier ouvertement. Alors que Nie Yinniang a pour mission de tuer son cousin, elle lui révèle son identité en lui abandonnant le morceau jade. Elle va devoir choisir : sacrifier l’homme qu’elle aime ou rompre pour toujours avec  « l’ordre des Assassins ». »

Réalisateur de nationalité chinoise, Hou Hao Yin a été a huit reprises, sélectionné en compétition du Festival de Cannes. Entre 1993 et 2015, huit des films sur lesquels il officiait en tant que réalisateur ont été sélectionnés. Et sur ces derniers, deux films ont été récompensés. Prix du Jury en 1993 pour le film Le Maître de Marionnettes, ainsi que le Prix de la Mise en Scène en 2015 pour The Assassin. Sa première et sa dernière sélection dans ce même festival. Invité habituel de la croisette, Hou Hao Yin n’est pas pour autant un réalisateur connu du grand public, à l’image de ceux qui ont délaissé le cinéma asiatique pour le cinéma hollywoodien durant un certain laps de temps. La question que l’on se pose maintenant est de savoir si la magnifique bande-annonce de sa dernière oeuvre The Assassin, ainsi que la récompense reçue à Cannes permettra au film de trouver son public en salles et au réalisateur de gagner en renom ?

Débutant par des cartons de contextualisation de l’histoire et de l’époque définie par le metteur en scène et le scénariste, The Assassin pourrait être un film propre à une époque. Ce qu’il fondamentalement pas du tout. The Assassin est un film aux actions intemporelles. Actions pouvant avoir lieues au IX comme au XIII ou avant le IXe siècle. Une époque est prédéfinie en amont afin de lancer une histoire et de faire comprendre au spectateur que ce temps est révolu. Cependant, le film n’en a pas besoin. Constitué tel un enchaînement de scènes, pouvant être à la fois prises à partie individuellement ou sous la forme d’un collectif formant un récit, le film à la force de ne pas chercher à créer un univers. The Assassin est un film à ambiance, un film où le silence est roi. Hou Hao Yin propose un long-métrage qui va à l’encontre de l’image que nous renvoie la Chine moderne. D’où, l’intérêt pour le réalisateur de faire comprendre que ce film est une fable, une plongée dans une Chine révolue, une Chine qui n’est plus. Partant de la volonté de jouer sur le silence et de faire du silence le maître mot du long-métrage, tant sur le point technique que de l’histoire, le metteur en scène inscrit son film dans un registre contemplatif. Un rythme de montage très lent, assez peu de mouvements de caméra, ainsi des plans qui durent afin de faire parler la mise en scène à l’instar des personnages. Le nombre restreint de dialogues ne constitue pas un défaut sur le plan technique, tant le film est d’une élégance et d’une pureté visuelle.

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Pour faire de The Assassin un long-métrage audacieux et original sur le plan visuel, Hou Hao Yin s’accapare les possibilités offertes par le cinéma. Il joue sur le format de l’image, tel un photographe jouerait sur la mise en page afin de donner aux photographies le format le plus avantageux, mais également sur la qualité de l’image afin de leurs implémenter un aspect granuleux, ancien ou tout au contraire, lisse et en définition impeccable. Élément primordial du film, la lumière va apporter une véritable plus value sensitive aux plans. Augmenter une profondeur de champ, instaurer une ambiance bien définie à chacun des plans, tel un tableau qui laisserait place à l’imaginaire du spectateur. La direction artistique de ce film est des plus magnifiques. Rendant des choix de cadres incohérents et difficilement compréhensibles. Et ce, malgré des compositions harmonieuses et astucieuses afin de jouer sur les différentes profondeurs que peuvent comporter les plans. The Assassin est un film visuel, un film qui réussi à enjoliver ses décors extérieur et intérieur grâce à un très joli travail sur la lumière et la composition des cadres. La mise en scène minimaliste, mais suffisante afin de donner du corps au protagoniste et à son histoire, ne fait que rehausser l’intérêt visuel du film aux dépens de son histoire. Faire de son long-métrage, un film contemplatif et visuel est un parti pris audacieux et qui a son intérêt. Faut-il encore que ce visuel raconte quelque chose et n’ait pas comme simple finalité d’être résumé à un simple enchaînement de tableaux. Aussi magnifiques et envoûtants soient-ils.

À cause de l’instauration d’un rythme de montage très lent, ainsi que d’une avancée de récit qui mise essentiellement sur la mise en scène, Hou Hao Yin ne passionne à aucun moment vis-à-vis de l’histoire qu’il souhaite conter. Envoûtant et captivant par son aspect visuel, et finalement riche de sens grâce au travail de mise en scène, l’histoire s’avère quant à elle royalement inexistante. L’on en comprend les tenants et aboutissants, mais pas ce qui en fait une histoire à part entière (histoire des personnages, les enjeux…). D’autant plus que le nombre réduit de dialogues ne permet pas d’établir aisément l’intérêt de chacun des plans, ainsi que leur enchaînement. Quel est l’intérêt du plan, que nous raconte-t-il, ou va le personnage, pourquoi effectue-t-il cette action et quelle est la finalité de leur relation ? Énormément de questions établies par la mise en scène, mais qui ne trouveront pas de réponses à cause d’un parti pris contemplatif qui prend le pas sur l’histoire au point de la rendre creuse et inintéressante. Il va de soi que lorsqu’il cherche à donner du dynamisme et de l’entrain à son film par le biais de scènes d’action, ça ne fonctionne pas. Le montage ne trouve pas de rythme adéquat, afin de ne pas passer du coq à l’âne, d’un rythme lent à un rythme extrêmement dynamique. Il va même jusqu’à rendre certains courts passages de chorégraphies de combat illisibles à cause d’un montage qui ne trouve pas son rythme.


En Conclusion :

The Assassin est l’exemple même du film technique, d’un essai artistique, d’un Œuf de Fabergé. Il est indéniable, et le film nous le prouve, que le réalisateur Hou Hao Yin est un excellent metteur en scène. Il sait diriger ses acteurs et donner du corps aux personnages par le biais de leur mise en scène respective dans l’espace. Cependant, faire un beau film, un film élégant et impressionnant, ne fait pas un bon film. À cause d’un rythme imposé par un montage contemplatif et des plans à rallonge dont l’aspect primaire réside dans la mise en avant d’une ambiance, The Assassin en oublie son histoire. Le film délaisse totalement son histoire et ses personnages secondaires par la même occasion. Des personnages qui nous paraissent insignifiants et auxquels le spectateur ne se lie pas. Captivé par les images, aux dépens de cette histoire sans enjeux émotionnels qui pourrait n’avoir ni début ni fin. Telle une simple tranche de vie, mais dont on ne retient rien, mis à part de beaux, très beaux tableaux que l’on peut par la suite interpréter un à un. Une belle déception.

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