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Quelques mots, sur ces œuvres que nous découvrons depuis le Québec ou la France, sur notre écran d'ordinateur ou dans notre salle de cinéma favorite.

Sang Froid, Liam Neeson joue les boogeyman des montagnes armé de son chasse neige

Synopsis : « Bienvenue à Kehoe, luxueuse station de ski du Colorado. La police locale n’y est pas franchement très sollicitée jusqu’au jour où le fils d’un conducteur de chasse-neige, Nels Coxman, est assassiné sur ordre de Viking, un baron de la drogue. Armé d’une rage implacable et d’une artillerie lourde, Nels entreprend de démanteler le cartel de Viking. Sa quête de justice va rapidement se transformer en une vengeance sans pitié. Alors que les associés de Viking « disparaissent » les uns après les autres, Nels passe d’un citoyen modèle à un justicier au sang-froid, qui ne laisse rien – ni personne – se mettre en travers de son chemin. »


Il avait dit qu’il arrêterait, mais finalement on ne compte plus les films dans lesquels l’acteur britannique Liam Neeson part à la recherche de l’homme qui a tué sa fille ou son fils ou toute sa famille. Il n’incarne plus de personnages à part entière, il est Liam Neeson. Tels Martine ou Oui-Oui qui changent de lieu pour chaque nouvelle aventure, Liam Neeson change de veste et de pays, mais garde le même objectif : se venger. Tu m’étonnes que ça lui monte à la tête, pauvre garçon. Onze ans après la sortie du film Taken, production française au succès international qui a engrangé des dizaines d’enfants non désirés par le public, l’acteur en est au même point. Si on excepte un certain A Walk Among the Tombstones sauvé par sa dynamique nonchalante, son atmosphère pensante et sa superbe photographie, ainsi que l’exception qui confirme la règle, à savoir le prodigieux film de survie The Grey, Liam Neeson enchaîne les productions toutes moins plaisantes les unes que les autres. Si ces films plaisent à certains spectateurs, permettant à ces derniers de passer « un bon moment de divertissement », de notre côté on remarque surtout une certaine descente aux enfers de sa carrière à cause de l’image que lui affuble la répétition de ce genre de production dans sa filmographie.

Aujourd’hui on ne parle pas de Taken 4, on se remet à peine du troisième, mais bel et bien de Cold Pursuit, titré Sang Froid pour sa sortie française. Film dont la traduction québécoise n’est autre que Poursuite de Sang-Froid et ce titre est une fois vraiment très bon. Une bonne alternative, là où Sang Froid, c’est juste accrocheur et finalement peu respectueux du titre original, si on cherche simplement à faire une traduction littérale en bon français. Après Liam Neeson dans un avion, Liam Neeson en forêt ou encore Liam Neeson au cimetière, voici Liam Neeson dans les montagnes avec de la neige jusqu’aux genoux. Dans cette nouvelle aventure, Liam Neeson décide de venger la mort de son fils, tué par de méchants trafiquants de drogue. Armé de son chasse-neige et d’un fusil de chasse transformé en fusil à canon scié, il va tuer un à un chaque membre de cette organisation avant d’atteindre le grand baron du trafic de drogue : Viking ! Si sur le papier, Sang Froid n’a absolument rien n’intéressant et ne semble pas renouveler le genre du film d’action et de vengeance, il semblait vouloir user d’un humour noir trop peu exploité au cinéma. Quelques blagues et jeux de mots, mais également un ton décomplexé dans un univers rappelant évidemment le chef-d’oeuvre Fargo écrit et réalisé par les Frères Coen.

Sans atteindre le sommet de noirceur et de maîtrise dans les dialogues et l’atmosphère mise en place par les Frères Coen, on avait envie d’y croire. De croire que Sang Froid ne serait pas qu’un vulgaire film d’action écrit sans la moindre volonté de rendre les personnages intéressants et leurs actions logiques. Il n’y a aucune logique dans le scénario écrit par Frank Baldwin. Aucune logique ou même justification de chaque acte réalisé par chaque personnage. Frank Baldwin éjecte les personnages du récit un à un sans prendre le temps de chercher à les caractériser, ne serait-ce qu’un minimum. On sent la volonté d’aboutir sur un climax de haute volée après avoir enchaîné les exécutions les unes après les autres. Des exécutions stylisées, dans des lieux différents et avec des armes différentes afin de varier les plaisirs pour le spectateur. Un enchaînement de clips foncièrement pas mauvais, mais qui mit bout à bout ne forment pas un film. Ou alors juste un mauvais. Tel qu’on l’imaginait, Sang Froid se permet d’user de touches d’humour. Un peu de burlesque, quelques idées de comique de répétition, quelques blagues qui font sourires, mais également un méchant volontairement ridicule et ridiculisé par son fils de dix ans au regard bien plus lucide sur le monde.

Quelques bonnes idées qui permettent de sourire trois secondes par ici et trois secondes par là, mais le film trouve rapidement ses limites à cause d’un montage pas du tout adapté. Faire rire au cinéma n’est pas mince affaire. C’est une question de rythmique et d’une alchimie qui doit se faire entre les différents éléments qui sont à prendre en compte afin de faire rire. Un élément de mise en scène, un jeu avec la musique, une idée de montage… il faut trouver le bon rythme pour faire rire et Sang Froid ne le trouve pas. On comprend ce que le scénariste et le réalisateur ont voulu faire, mais ça ne fonctionne pas, donnant naissance à de nombreux moments de gêne et non de comédie. Et ce, souvent à cause d’un cut facile. Le découpage se veut être celui d’un film d’action rythmé et il ne laisse pas le temps à l’absurdité des situations de se mettre en place. Comme une peur d’aller vers la comédie absurde pure et dure, alors que c’est ce qu’ils essayent de faire. À croire que le scénario n’était pas clair là dessus, créant une mésentente arrivée en post-production. Des idées de comédie, mais qui ne restent que des idées qui nécessiteraient que l’on retourne en salle de montage afin de développer ces mêmes idées, et faire de Sang Froid une comédie d’action absurde et qui s’assume.

Prévisible, laborieux et d’une vacuité folle à cause de son histoire au concept éculé depuis des générations, Sang Froid est également un film dont le scénario se permet d’être opportuniste avec une facilité aberrante. Remake américain du film norvégien Refroidis du même réalisateur, Sang Froid cherche à parler aux Américains par le prisme de l’histoire de cet état de l’ouest qu’est le Colorado en mettant en scène des natifs américains. Ce qui part d’un bon sentiment, devient très rapidement maladroit réduisant ces derniers à l’image péjorative que l’on peut se faire d’eux en restant confortablement installé dans son canapé. Des personnes qui on un sens de l’honneur, mais pour certains méchants, alcooliques et qui aiment se faire des batailles de boule de neige parce que la neige c’est la nature et la nature c’est leur élément. Ce qui par d’un bon sentiment se transforme en un mépris involontaire dégoulinant envers les natifs américains. On ne parlera évidemment pas de la romance homosexuelle qui est posée là au milieu de tout afin de justifier la colère d’un personnage. Pour une fois qu’une réaction est justifiée, elle l’est à partir d’une thématique utilisée sans aucune raison, mise à part être opportuniste. Bien essayé. Alors oui, Sang Froid est un film qui possède quelques bonnes idées. Des idées de mise en scène qui réussiront à faire sourire, mais également à divertir lors de scènes d’actions relativement efficaces. Des idées qui se résument à quelques clips d’une grosse quinzaine de minutes, mais en rien à un long-métrage où la comédie se joindrait à l’action offrant 2h de plaisir à un spectateur en émoi. La consternation et l’ennui restent aux aguets, prêts à refaire leur apparition dès une scène d’action terminée. Et il y en a très peu.


« Comédie d’action parsemée de quelques moments drôles et divertissants, mais enneigée par un scénario extrêmement mal écrit et un découpage laborieux. »


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