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Quelques mots, sur ces œuvres que nous découvrons depuis le Québec ou la France, sur notre écran d'ordinateur ou dans notre salle de cinéma favorite.

No Time To Die

« Dans Votre Écran », votre rubrique qui revient en quelques mots, sur ces œuvres -majoritairement audiovisuelles- que nous découvrons depuis le Canada ou la France, sur notre écran de salon, d’ordinateur ou dans notre salle de cinéma favorite.

Après une pandémie et quelques confinements plus tard, No Time to Die, Mourir peut attendre en français débarque enfin sur les écran. Voici enfin le dernier tour de piste de Daniel Craig dans le costume du célèbre agent 007. Un Bond décrié quand il endossa la panoplie de l’espion britannique : un James Bond blond !!! Et un Bond décrié désormais pour cette dernière aventure tant la critique se dispute sur le scénario que certains jugent indigne d’une histoire de Ian Fleming.

Pourquoi tant de haine ? Après tout la construction reste celle de toute aventure de l’agent 007 : une introduction dantesque, une première partie où Bond a de nouveau pris sa retraite, la recherche des motivations du méchant, l’affrontement final et les notes du générique de fin… en clair, rien de plus classique sauf que chez Daniel Craig, ce film marque la fin d’une boucle narrative débutée avec Casino Royale. Et en ce sens, Neal Purvis et Robert Wade achèvent de creuser le sillon sur les traumas du héros. Après la mort de son premier amour, de sa mère de substitution et une querelle de famille, Bond n’a plus qu’à conclure son aventure de Spectre en laissant enfin le passé de côté pour vivre heureux avec Madeleine Swan.

Là est tout l’enjeu de ce nouveau Bond : qui est Madeleine réellement ? La question se pose après l’ouverture sur la jeunesse de la psychiatre où nous est présenté le nouveau méchant de cette aventure : Safin. Un homme pour toujours lié à Madeleine par une blessure. Après ce retour dans le temps, se déroule ensuite une introduction où James Bond semble enfin couler des jours heureux mais le passé est toujours là, vivant et vivace… entraînant le premier morceau de bravoure du film où les deux scénaristes sèment le doute dans l’appréciation de l’histoire chez le spectateur.

Le générique signée Billie Eilish et son frère Finneas O’Connell s’inscrit dès lors dans la plus pure tradition des génériques des vieux Bond, loin du rock puissant des deux premiers opus de la saga Craig. Un retour aux sources d’une logique implacable où Cary Joji Fukunaga, le réalisateur, et Phoebe Waller-Bridge, scénariste de Fleabag et Killing Eve, décident de reprendre les origines d’un Bond plus romantique et torturé. Le fameux Bond incarné par George Lazenby dans Au service secret de sa majesté.

Avec quatre scénaristes, le scénario de ce 25e Bond prend un chemin inattendu, loin du balisage de Spectre pour revenir à l’essence même de l’agent secret : un homme blessé. Et sa mise à la retraite oblige des changements au sein du MI6 : le double zéro 7 iconique est ainsi donné à une femme : Nomi, qui devient la première à porter le matricule 007. Un scandale pour les puristes… mais franchement, il ne s’agit là que d’un numéro ?! Pourquoi tant de haine alors que Lashana Lynch est impeccable ! Et surtout on retrouve les bases : M, Bill Tanner, Q, Moneypenny, même Felix Leiter : donc un environnement qui rassure… au point même d’entrer dans la vie privée de certains d’entre eux. Q se souviendra toujours de son repas avorté avec un futur amant.

Ce 25e épisode surprend par les choix décidés par les scénaristes : les faiblesses de Bond, le fait qu’une femme puisse porter le matricule si célèbre, les James Bond Girls qui ne sont pas de simples atouts charmes ou des trophées pour l’agent secret. Ana de Armas est hilarante en jeune espionne qui mène sa première « grosse » mission. Lashana Lynch a cette distance nécessaire pour remettre à sa place aussi bien Bond que M… et puis le retour de Léa Seydoux se fait simplement mais de façon nécessaire. Elle est le véritable enjeu dont l’interprétation est souvent sur la corde raide… au risque parfois de surjouer, ce qui pourra agacer.

L’histoire préfère aussi toucher la corde sensible au détriment d’une intrigue vite balayée. Et ce n’est sans doute pas plus mal… car l’histoire basée sur la possibilité de détruire la population par un virus maléfique jouant sur l’ADN, rappelle énormément la période vécue depuis l’apparition du Covid-19. No Time To Die est au final le premier film d’après pandémie dont le scénario est d’un réalisme angoissant… aussi pardonnera-t-on le méchant très faiblard pour cette dernière aventure : Rami Malek n’est sans doute aussi iconique que l’on aurait pu attendre pour ce tour de piste ultime de Daniel Craig.

Il faut reconnaître que depuis Skyfall, Javier Bardem a tout de même porté la némésis de Bond au sommet… même Christophe Waltz n’a pas été le méchant à la mesure du rôle de Blofeld et Rami Malek ne réussit pas à incarner l’ennemi environnemental qui aurait dû terrifier les spectateurs. Mais finalement ce n’est pas le plus important. En effet, ce Bond boucle un cycle où ses failles sont le fil ténu sur lequel il mène son ultime combat. Un combat contre lui-même, contre les habitudes où pourtant on retrouve des petits cailloux semés par le Petit Poucet comme pour nous pouvoir nous ramener finalement à la maison.

Ce Bond joue avec les codes, les déjoue pour mieux se renouveler et aboutir au final implacable et totalement justifié… mais à ce stade, il ne faut pas en dire plus. En clair ce Bond surprend et divise parce qu’il s’éloigne de la figure machiste du héros que l’on a eu l’habitude de connaître. Alors, doit-on invoquer une révision « woke » de l’agent secret ? Il ne faut pas pousser non plus. Il s’agit là d’une évolution logique et voulue par cet arc narratif qui redéfinit Bond. Y aura-t-il une femme pour le remplacer ? Barbara Broccoli a balayé cette idée d’un « non » catégorique… Bond restera Bond mais désormais ses failles et faiblesses seront exploitées car il en devient plus humain et proche de nous. Ce No Time To Die est un très bon cru, un cran en-deçà de Casino Royale qui redéfinissait le Bond et surtout Skyfall (pour moi un sommet) mais il n’est pas à rejeter malgré son méchant falot car Daniel Craig livre une partition ultime incroyable. L’acteur dit adieu à son personnage, qui lui a apporter la gloire, avec une classe britannique folle : il a su remettre James Bond au centre du jeu.

Quel sera le futur de l’agent secret ? L’avenir le dira en espérant qu’il ne faille pas attendre aussi longtemps que ce 25e opus car si Mourir peut attendre, attendre le 26e Bond pourrait bien nous faire mourir… d’impatience.

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