CinéCinéphile

Quelques mots, sur ces œuvres que nous découvrons depuis le Québec ou la France, sur notre écran d'ordinateur ou dans notre salle de cinéma favorite.

Loving réalisé par Jeff Nichols [Sortie de Séance Cinéma]

Loving - Affiche

Synopsis : « Mildred et Richard Loving s’aiment et décident de se marier. Rien de plus naturel – sauf qu’il est blanc et qu’elle est noire dans l’Amérique ségrégationniste de 1958. L’État de Virginie où les Loving ont décidé de s’installer les poursuit en justice : le couple est condamné à une peine de prison, avec suspension de la sentence à condition qu’il quitte l’État. Considérant qu’il s’agit d’une violation de leurs droits civiques, Richard et Mildred portent leur affaire devant les tribunaux. Ils iront jusqu’à la Cour Suprême qui, en 1967, casse la décision de la Virginie. Désormais, l’arrêt « Loving v. Virginia » symbolise le droit de s’aimer pour tous, sans aucune distinction d’origine. »


Les lumières de la salle de cinéma s’allument, tu te repositionnes sur ton siège pour avoir fière allure parce que la position « je m’installe comme à la maison » ce n’est pas trop ça, et là, ton ami(e) se retourne vers toi et te pose la question fatidique…

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De Jeff Nichols, on retient surtout ce cinéaste qui d’un petit rien raconte une grande histoire. Après l’épatant Midnight Special et le superbe Take Shelter, voici son 5e film : Loving. Chacun de ces films a un point commun : ils sont habités du même feu, celui de l’amour de l’autre. Qu’il soit filial, marial, protecteur, Jeff Nichols réussit à embarquer le spectateur au plus près des personnages. Cela nous permet de rester à leurs côtés et également de ressentir leurs troubles, leurs angoisses, leurs défaites et leurs succès. Après nous avoir poussés à chercher un lieu de protection pour une famille face à une menace climatique et nous avoir permis de protéger un jeune garçon aux pouvoirs spéciaux, le réalisateur se place ici dans les années 1960. Pour être plus précis, en pleine période ségrégationniste aux USA où un blanc et une noire ne peuvent se marier et envisager d’avoir une vie de couple. Bien entendu, il est facile de comprendre que l’histoire va tourner autour de la volonté pour Mildred et Richard de vivre leur amour au grand jour et surtout légalement puisque l’État de Virginie leur interdit. La nouveauté pour Jeff Nichols est qu’il adapte une histoire vraie. Un peu de recherche sur le net vous permettra de découvrir de suite la fin… mais est-ce gênant de déjà la connaître ? Non, car le réalisateur réussit à instiller une atmosphère lourde et moite, celle du sud des USA pour embarquer le spectateur et l’entraîner sur les traces des Loving.

Après avoir séduit la croisette, ce couple devrait ne pas vous laissez de marbre.

Vous l’avez vu venir le jeu de mots avec « Loving« . Il s’agit bien là du nom du couple et en même temps quoi de mieux que le terme « Love-Amour » pour parler de ces deux êtres qui s’aiment contre tous. Pour interpréter ces deux héros d’un quotidien banal, ordinaire et cruel, Jeff Nichols s’appuie sur Joel Edgerton (qu’il a dirigé dans Midnight Special) et Ruth Negga (la révélation du film). Si le premier impose ses râles et mangent ses mots pour ne pas être compréhensible parce qu’il ne montre pas ses failles, il est entouré par l’amour surpuissant de Ruth Negga qui est persuadé que tout est possible. Elle est la révélation du film : on se demande même comment le cinéma n’a pas fait appel plus tôt de sa douceur et en même temps de sa force. Cette force qui se dégage de ce petit bout de femme prête à faire face à tout par amour. En choisissant des tonalités sépia et pastel pour son film, il crée une ambiance en même temps étouffante quand les héros sont dans leur Sud natale et  « enveloppante » quand ils sont en famille. C’est leur exil forcé à Washington qui entraîne une photographie grise marquant par là le désespoir qui habite Mildred et Richard. Ces mêmes tons gris et délavés qui sont présents lors des visites avec les avocats. Dans ce film universel qui parle d’un amour interdit alors qu’il est naturel, Jeff Nichols pousse l’identification par le prisme du vécu du spectateur afin de mieux nous toucher. Jouant par là sur l’émotion plus que sur une simple empathie. Loving réussit le tour de force de nous entraîner dans la colère de Richard et les espoirs de Ruth lorsqu’ils sont en prison, lorsqu’ils rencontrent les avocats, lorsqu’une issue semble possible pour crier à la face du monde que l’amour est possible quel que soit son origine, sa couleur de peau, ses préférences. Puis quelques clins d’œil salvateurs permettent par moment de relâcher la pression : la présence de Michael Shannon en photographe de Life est un plaisir de cinéphile. Jeff Nichols cherche ainsi à desserrer l’étreinte autour du spectateur pour mieux lui asséner des frustrations supplémentaires, car la loi des USA semble plus forte que tout. Et finalement, si vos yeux sont un peu embués, c’est seulement parce que Jeff Nichols réussit à doser l’émotion. Il évite ainsi une histoire qui aurait pu être larmoyante.

Non, l’histoire des époux Loving n’est pas un drame comme les autres, car il est celui d’un combat où l’amour l’emporte, mais au prix d’une peine et d’une douleur sourde et continue… et il reste à la fin les 8 mots de Mildred… ses 8 mots, cette phrase qui vous fera pleurer, car elle démontre tout l’amour qu’elle avait pour Richard : en inscrivant pour l’éternité ce qu’il fut pour elle, renversant les rôles de ce que l’on aurait pu comprendre.

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