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Quelques mots, sur ces œuvres que nous découvrons depuis le Québec ou la France, sur notre écran d'ordinateur ou dans notre salle de cinéma favorite.

Logan Lucky réalisé par Steven Soderbergh [Sortie de Séance Cinéma]

 

Synopsis : « Deux frères pas très futés décident de monter le casse du siècle : empocher les recettes de la plus grosse course automobile de l’année. Pour réussir, ils ont besoin du meilleur braqueur de coffre-fort du pays : Joe Bang. Le problème, c’est qu’il est en prison… « 


Les lumières de la salle de cinéma s’allument, tu te repositionnes sur ton siège pour avoir fière allure parce que la position « je m’installe comme à la maison » ce n’est pas trop ça, et là, ton ami(e) se retourne vers toi et te pose la question fatidique…

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Seize années après avoir lancée de la plus belle des manières la trilogie Ocean, et, avant de la terminer de la plus mauvaise, Steven Soderbergh sort de sa « retraite » pour un nouveau cambriolage. Le réalisateur américain a décidé de prouver aux majors et au business cinématographique en règle générale qu’il était possible de faire des films sans leurs aides. Un film autofinancé, dont il est officiellement réalisateur et monteur. Officieusement il en est également le chef opérateur et sa femme la scénariste. Tous deux crédités sous deux faux noms, et ce, depuis plusieurs films maintenant. Logan Lucky signe donc le retour du réalisateur au « heist movie ». Un genre qu’il affectionne et qui par le passé, lui a permis de gagner en reconnaissance. Finalement quoi de plus logique que de le voir aujourd’hui, revenir à ce genre et plus précisément, à un « heist movie » décalé et absurde. Absurde, tant dans ses dialogues et ses situations, que dans la caractérisation de ses personnages.

Steven Soderbergh cherche à s’émanciper du business, s’éloigner d’Hollywood. Pour se faire, il impose une ambiance bien loin de ce qu’on a l’habitude de voir, représenté par un décor : le Connecticut. Pas de grandes villes à l’horizon, ni même de buildings. Pas de signes de modernité apparents, aucune utilisation des moyens de communication modernes et le protagoniste de l’histoire (interprété par Channing Tatum) apparaît rapidement comme une transposition à l’image du réalisateur et de sa façon de penser. Un personnage réfractaire à l’utilisation d’un téléphone, cherchant avant tout l’émancipation et la possibilité d’être libre de ses faits et gestes, même si finalement toujours contraint par la société. Un solitaire, sans pour autant être casanier ou renier les siens, bien au contraire. La famille est ici centrale à l’histoire, permettant la création et le développement d’un panel de personnages hauts en couleurs tous aussi intéressants que différents. S’affiche ainsi de manière prédominante une opposition, une dualité entre la vie que mène ce personnage et la vie que mène la nouvelle famille de son ex-femme (interprétée par Katie Holmes). Un père vendeur automobile, une mère femme au foyer et une jeune fille qui participe au concours de mini-miss, vivant tous trois dans de grandes villas luxueuses. La campagne face à la ville, la débrouille face au business, la liberté face à l’emprisonnement de la société de consommation.

Steven Soderbergh mène en sous-texte sa guerre face à Hollywood, face à la société de consommation et plus globalement à l’Amérique. Le braquage n’est qu’un prétexte, qu’une enveloppe qui promet du divertissement à la « Soderberg », mais il ne représente que la surface émergée d’une œuvre finalement plus personnelle qu’elle n’aurait pu paraître l’être. Une critique intéressante, venant enrichir l’œuvre qui n’a fondamentalement rien d’un divertissement lambda ou d’un film pop-corn tel que la trilogie Ocean peut le paraître. Le rythme est beaucoup plus lent, les musiques presque inexistantes et la mise en scène très statique. Et ce, même lors du braquage. Il faudra attendre la fin de ce braquage et ces quelques rebondissements pour retrouver l’entrain d’un Ocean’s Eleven. Un défaut en soi, l’ennui se faisant ressentir à quelques moments. Mais un parti pris parfaitement cohérent avec la caractérisation du protagoniste et cette volonté première d’effectuer un pied de nez à cette société de consommation où tout doit aller vite et va de plus en plus vite. Steven Soderbergh va jusqu’au bout de cette volonté en faisant d’une course automobile de Nascar l’objet du braquage. La Nascar étant un véritable business en plus d’être la course automobile la plus rapide au monde avec ses véhicules tournants à 300km sur un circuit ovale durant des heures. La logique est là et la thèse de la projection du réalisateur en protagoniste de l’histoire, confirmée.

Particulièrement drôle, même si jamais hilarant – ce qu’il ne se prétend pas être non plus – Logan Lucky est une comédie de qualité, un film de genre divertissant et intéressant à défaut d’être éblouissant. On y retrouve les qualités et les défauts d’un « Soderberg Movie » : un scénario porté par des personnages aux forts caractères, complètement délirants et absurdes ; une réalisation aux cadres, axes de caméra et focales souvent imprévisibles (ce qui n’est en rien un défaut, mais apporte une véritable plus-value au film) ; et une direction artistique, ici assez « sale » et terne, en cohérence avec le décor principal et le background des protagonistes. Steven Soderbergh ne cherche pas à faire un beau film, une œuvre visuellement belle, mais un film dont la photographie et la colorimétrie seront cohérents, apportant à l’œuvre une ambiance, un ton, une véritable identité. Logan Lucky, un « heist movie » drôle et divertissant, même s’il manque de punch et d’impact, mais aux sous-textes intéressants et porté par des interprètes – Daniel Craig, complètement en roue libre – vraiment excellents.

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