CinéCinéphile

Quelques mots, sur ces œuvres que nous découvrons depuis le Québec ou la France, sur notre écran d'ordinateur ou dans notre salle de cinéma favorite.

Continuer (Keep Going) réalisé par Joachim Lafosse [Sortie de Séance Cinéma]

 

Synopsis : « Sybille, mère divorcée, ne supporte plus de voir son fils adolescent sombrer dans une vie violente et vide de sens. Elle va jouer leur va-tout en entraînant Samuel dans un long périple à travers le Kirghizistan. Avec deux chevaux pour seuls compagnons, mère et fils devront affronter un environnement naturel aussi splendide qu’hostile, ses dangers, son peuple… et surtout eux-mêmes ! »


Les lumières de la salle de cinéma s’allument, tu te repositionnes sur ton siège pour avoir fière allure parce que la position “je m’installe comme à la maison” ce n’est pas trop ça, et là, ton ami(e) se retourne vers toi et te pose la question fatidique…

À Perdre la Raison, Les Chevaliers Blancs puis L’Économie du Couple. Trois films forts qui ont marqué une bonne partie du public qui a découvert ces films à leurs sorties ou plus tardivement. Trois films conçus, ou tout du moins, sortis à quatre ans d’intervalles, prouvant la volonté de faire du cinéaste Joachim Lafosse. Il enchaîne, ne faiblit pas et ne s’offre aucun répit, le cinéma semblant être ce qu’il aime, le média qui lui permet de raconter de belles et fortes histoires. Un cinéaste qui depuis le début de sa carrière en tant que réalisateur (courts et longs-métrages) s’intéresse avec précision à la vie de famille et plus principalement à la dureté de la vie de famille. Des familles séparées, endeuillées ou à chaque fois en voie de. Des récits difficiles, assez lourd pour ne pas dire beaucoup trop appuyés très souvent, mais toujours teintés de bons sentiments et de beaux moments grâce à une belle direction d’acteurs et d’actrices. Pour son nouveau long-métrage, le cinéaste français ne déroge pas à cette règle qui semble être sienne : conter l’histoire d’une famille troublée et en difficulté. Mais pour la première fois, il s’échappe du territoire français et signe un véritable road movie tourné dans le désert marocain afin de créer l’illusion d’une histoire qui se déroule dans les pleines arides du Kirghizistan.

Si le film Les Chevaliers Blancs sortait déjà du sol français afin de nous emmener sur le continent africain, l’histoire se déroulait entièrement au sein de villages. Un terrain balisé et où l’homme y a monté des habitations. Avec Continuer, Joachim Lafosse pousse les murs et met son duo principal composé d’une actrice et d’un acteur en selles. Virginie Efira et Kacey Mottet Klein face au danger représenté par cet environnement qui leur est complètement hostile malgré une langue, le russe, connue et parlée par la première. Au-delà de l’évasion permise par l’environnement qui fait du bien et change clairement de ce que le spectateur peut avoir l’habitude de voir, l’environnement désertique est le meilleur élément afin de créer un face à face. Le face à face tant redouté entre une mère et son fils qui ne semblent plus s’aimer, se parler, tout en conservant se lien qui unie qu’on le veuille ou non, une mère à son fils. Par la force des choses ils vont être amenés à se parler, s’engueuler, s’aimer de nouveau ou se détester au point de créer l’impensable.

Le Kirghizistan est ici un terrain de jeu, un bac à sable pour le cinéaste Joachim Lafosse. Il va s’en servir afin de modeler l’histoire et créer des rebondissements au sein de cette relation mère/fils on ne peut plus tendue. Mettre en place de nouvelles rencontres, les pousser à bout physiquement comme psychologiquement… tout va être prétexte à développer la personnalité de chacun des personnages, faire découvrir leur(s) histoire(s) aux yeux du spectateur tout en enrichissant la confrontation. Le procédé de narration est simple, mais fonctionne superbement. Le spectateur est attentif et dans l’expectation de l’arrivée d’une nouvelle péripétie, de cet élément qui va envenimer ou relever la situation. Même si captivant et jonché par de beaux moments d’émotions notamment grâce à une Virginie Efira qui tient ici une prestation absolument épatante (un personnage d’une force de caractère et d’une intériorisation incroyables), Continuer ne demeure pas moins qu’un petit road movie balisé et sans véritables surprises. Les deux personnages doivent résoudre un conflit et que cela se termine bien ou mal, on sait où l’on va. L’on sait simplement pas de quoi sera façonné le chemin et ce dernier ne vous marquera pas par ses rebondissements tous assez caricaturaux et déjà exploités dans divers road-movie ou drame où les personnages devaient faire face à un environnement hostile. Un film qui renouvelle rien, ne surprend en rien, et ce, tant sur le plan scénaristique que formel.

Supervisé par le directeur de la photographie Jean-François Hensgens, ce dernier s’en donne à cœur joie, filme de magnifiques décors et se permet quelques fulgurances que n’importe quel artiste aurait cherché à réaliser (contre jours, belles perspectives…). Un visuel qui permet de garder l’attention du spectateur. Malheureusement, la mise en scène beaucoup trop plate (personnages qui vont d’un point A à un point B, avant que ne survienne un rebondissement, avant de reprendre la route…) ne lui permet pas toutes les extravagances stylistiques et expressionnistes qui auraient été agréables à l’oeil. Aucun changement climatique, un film qui se déroule majoritairement de nuit… On fait rapidement le tour des possibilités, même si encore une fois ce qui est fait, est bien fait. Fidèle à ses habitudes Joachim Lafosse cherche à rester près de ses personnages, avec un naturalisme ici beaucoup trop sage pour donner au film l’ampleur qu’il aurait pu avoir. Jean-François Hensgens en est capable et l’a déjà prouvé, mais pour cela il lui aurait nécessité plus de libertés et une mise en scène bien plus extravagante et recherchée. On notera quand même la belle utilisation du format d’image standard 1,85:1 qui permet de jouer sur la verticalité des décors tout en ayant toujours une notion d’éloignement ou de rapprochement entre les deux personnages principaux.

S’il aurait pu être une véritable bouffée d’air frais dans une filmographie bien balisée, même si recelant de beaux films, Continuer n’est finalement que la continuité de ce à quoi Joachim Lafosse nous a déjà habitué. Sous son aspect road movie, Continuer recèle un drame familial entre un mère et son fils qui ne se comprennent plus. Ceux qu’ils vont rencontrer sur leur route, pour le meilleur comme pour le pire, ne seront que des faire-valoir. Aucun développement scénaristique, aucune mise en valeur de leurs cultures respectives. Et il en va de même pour le désert qui n’est finalement pas utilisé comme un personnage à part entière, juste comme d’un terrain de jeu facilitant l’amoncellement scénaristique de rebondissement pour faire avancer l’histoire. Un film sans surprises, peu marquant ni intéressant malgré un casting de qualité et notamment une Virginie Efira épatante. Aidée par de magnifiques décors et de beaux plans signés Jean-François Hensgens, ils sauvent le film d’un oublie qui malheureusement lui semble déjà promis.

Au Cinéma le 23 Janvier 2019 en France


« Un cruel manque d’audace en fait  un énième drame familiale peu enthousiasment malgré des décors incroyables et une prestation à couper le souffle de Virginie Efira. »


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