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Quelques mots, sur ces œuvres que nous découvrons depuis le Québec ou la France, sur notre écran d'ordinateur ou dans notre salle de cinéma favorite.

CATS, le film à poils qui va alimenter vos plus sombres cauchemars


Synopsis : « L’adaptation de la comédie musicale Cats. Une fois par an au cours d’une nuit extraordinaire, les Jellicle Cats se réunissent pour leur grand bal. Leur chef, Deuteronome, choisit celui qui pourra entrer au paradis de la Jellicosphère pour renaître dans une toute nouvelle vie. »


Les lumières de la salle de cinéma s’allument, tu te repositionnes sur ton siège pour avoir fière allure parce que la position “je m’installe comme à la maison” ce n’est pas trop ça, et là, ton ami(e) se retourne vers toi et te pose la question fatidique…

Auréolé de l’oscar du meilleur film en 2011 pour le film Le Discours d’un Roi, Tom Hooper a depuis de nouveau fait parler de lui avec une comédie musicale et non des moindres. Nommé, entre autres, à l’Oscar de la Meilleure Chanson, Les Misérables aura su faire parler de lui. Un film fortement critiqué, notamment pour sa mise en scène flemmarde, n’ayons pas peur des mots. Sans parler de l’acteur australien Russell Crowe pour sa prestation en Inspecteur Javert. Acteur de charisme, mais réel miscast dans le cadre d’un film chanté comme celui-ci. Il n’en demeurait pas moins un film intéressant sur certains points, notamment dans sa direction artistique. Un film historique aux décors soignés, permettant une immersion partielle du spectateur. De beaux costumes, de beaux décors, mais une mise en scène pataude qui ne cherchait aucunement à correctement exploiter ces mêmes décors. Tom Hooper, un metteur en scène bien plus concentré dans sa manière de faire danser et chanter son casting, plutôt que de créer de beaux moments de cinéma. Le voir aux commandes d’un projet tel que Cats c’est le voir s’embourber dans un projet où il devra se défaire d’une histoire aussi peu conventionnelle que peu intéressante. Là où Les Misérables (adaptation du chef d’œuvre écrit par Victor Hugo) raconte quelque chose de fort et consistant, car reposant sur un réel propos social engagé pouvant dresser une analogie entre le présent et un passé hypothétique, Cats n’a sur le papier, absolument rien d’engageant.

Cats, conte l’histoire raconte l’histoire des Jellicles, une gang de chats qui à la tombée de la nuit réalisent le « Jellicles Choise », concours qui a pour but de choisir le chat le plus talentueux afin de l’envoyer au Heaviside Layer et lui offrir une nouvelle vie. Sois talentueux, gagne ton ticket pour monter au paradis et utiliser une de tes neuf vies de chat afin d’espérer ne plus être un chat de gouttière dans la prochaine. Telle est l’histoire de Cats, comédie musicale composée par Andrew Lloyd Webber d’après le recueil de poésie écrit par T.S. Eliot et publié en 1939. Si les poèmes avaient peut-être du sens, une richesse dans les rimes et une symbolique forte permettant d’aller au-delà de ce qui relève de l’histoire en elle-même, ce n’est pas le cas de la comédie musicale. Utiliser la mythologie qui entoure l’animal pour parler de la possibilité d’une vie nouvelle, d’une vie en dehors de la rue et des problèmes. Une belle idée sur le papier, une belle idée pour de la poésie et le lyrisme de la poésie. En animation, cela pourrait donner lieu à un film d’une tendresse et d’une mélancolie infinie tant certaines techniques d’animation permettent d’inculquer une forme de tendresse et de légèreté à une histoire profondément triste (Anomalisa et Psychonautas en sont de parfait exemples). Avec ce long-métrage, Tom Hooper fait preuve de suffisance et de facilité en choisissant d’adapter la comédie musicale et non, de réaliser une libre adaptation du recueil de poésie. Il aura pu en résulter une œuvre unique, onirique et mélancolique. Et non un vulgaire copier-coller dont la non-créativité n’a d’égal que le mauvais goût de la direction artistique.

Qu’on se le dise, si les premières images laissaient présagées une catastrophe industrielle à hauteur de 250 millions de dollars de budget, le résultat renvoi vos premières impressions tout droit au paradis des chats. A l’image de son précédent long-métrage, le cinéaste américain fait preuve de suffisance créative en démontrant à aucun moment l’envie de faire de la mise en scène. Il agit en tant que scénographe et non en tant que metteur en scène. Il dirige son casting, fait entrer et sortir de nouveaux personnages de la scène suivant la chanson qui se joue. Ils vont et viennent, poussant sans cesse un personnage principal accablé par les autres afin de lui faire prendre un chemin bien précis qui va le mener d’un moment musical à l’autre. Un enchaînement de moment musicaux à défaut de raconter une histoire par le biais de moment purement dialogués. Le manque d’une narration consistante se fait très rapidement sentir. Le manque d’un storytelling, d’une storyline qui permette à cette histoire (aussi inintéressante soit-elle) de prendre vie au-delà des paroles des chansons. Créer des moments de cinéma. Mettre en scène ses personnages. Les faire devenir de réels personnages avec une identité, un background, et non les laisser pour compte en les faisant danser en avant ou arrière-plan. Même les personnages qui ont de l’importance font de la peine, tant le cinéaste ne leur donne pas la possibilité de devenir de réels personnages. Un vide abyssal dans cette mise en scène qui concerne tout autant la manière de non-diriger le casting, que dans la manière d’exploiter les décors.

A chaque chanson son décor. Ils évoluent de décor en décor dans le simple but d’aller à la rencontre d’un nouveau personnage qui va amorcer le morceau musical suivant. Les décors sont des prétextes. Ils ne sont jamais sublimés par la direction de la photographie ou la moindre once de mise en scène, alors qu’il y a matière à. Jamais Tom Hooper et son directeur de la photographie Christopher Ross ne se préoccupent des échelles de plan ou de la création de perspectives. Jamais ils ne cherchent à donner l’impression que les personnages sont des chats qui évoluent dans un monde qui n’est pas à leur grandeur. Jamais l’on ne ressent une impression d’immensité, développant cette confusion : ce sont des chats ou des êtres humains ? Confusion initialement créée par cette volonté artistique d’appliquer numériquement un pelage de chat sur le corps des acteurs et actrices. Un parti pris inédit, qui aurait pu être intéressant, mais dont résulte simplement et seulement un choc visuel auquel nos yeux ne peuvent s’habituer. Ils agissent comme des chats, mais réagissent comme des humains, ont des visages d’humains et des morphologies humaines. Au-delà d’être visuellement laid, n’ayons pas peur des mots encore une fois, c’est un réel non-sens. Ils ne sont ni mécaniques, ni physiques, ni numériques. Ils ne sont ni humains, ni animaux. C’est un tout, c’est insensé. Attestant que l’on est bien plus proche d’une suffisance, d’une fainéantise de la part du metteur en scène qui n’a pas su comment innover, créer et donner du corps à ses personnages et à cet univers, que d’un parti pris créatif défendable.

Cats est un cauchemar cinématographique. Un cauchemar éveillé que l’on aurait pu défendre, que l’on aurait pu avoir envie de défendre s’il avait été doté d’un parti pris artistique et d’une envie de créer de la part de son metteur en scène. Un metteur en scène qui se contente de recycler, de créer des moments musicaux entraînant à défaut de raconter une histoire, de donner du corps à ses personnages, de se servir des décors, de développer son univers et de faire de belles images. C’est entraînant, car les musiques le sont, mais elles étaient déjà écrites, déjà existantes dans la conscience collective pour certaines. Tout ce qui relève de la nouveauté, relève du non-sens créatif au point où Cats en devient fascinant, hypnotisant.

« Laid, une mise en scène insensée, aucune narration, un sens du cadre à en faire pâlir un aveugle et pourtant impossible de décrocher. Hypnotisé par ce suicide artistique qui va à coup sûr enrichir vos plus sombres cauchemars. »


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