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Quelques mots, sur ces œuvres que nous découvrons depuis le Québec ou la France, sur notre écran d'ordinateur ou dans notre salle de cinéma favorite.

A Simple Favor (L’Ombre d’Emily) réalisé par Paul Feig [Sortie de Séance Cinéma]

Synopsis : « Stéphanie cherche à découvrir la vérité sur la soudaine disparition de sa meilleure amie Emily. »
Les lumières de la salle de cinéma s’allument, tu te repositionnes sur ton siège pour avoir fière allure parce que la position “je m’installe comme à la maison” ce n’est pas trop ça, et là, ton ami(e) se retourne vers toi et te pose la question fatidique…

Si le grand public ne le connait que depuis une petite dizaine d’années, cela fait maintenant vingt ans que Paul Feig sévit en tant que réalisateur. TV Movies, TV Séries (il a notamment réalisé des épisodes de séries bien connues comme Weeds, Mad Men ou encore Parks and Recreation), mais également quelques longs-métrages inconnus au bataillon avant que ne survienne un certain projet intitulé Bridesmaids. C’est en 2011 que ce dernier s’est fait un nom auprès du public, après avoir fait ses gammes auprès de divers producteurs et personnes dont il a gagné la confiance. Il a travaillé, mis du temps pour y arriver, mais il l’a fait. Depuis le succès international du film Bridesmaids, Paul Feig enchaîne les grosses productions. The Heat, Spy puis un certain Ghostbusters. Des comédies d’action ayant un certain faible pour l’humour potache qui ont enfermé le cinéaste dans un carcan dont il ne semblait pas pouvoir ou vouloir se défaire. Heureusement pour lui, le projet The Heat 2 n’a pour le moment pas vu le jour grâce à une des actrices principales, réfractaire au projet. Grâce à Sandra Bullock, le cinéaste s’est tourné vers un autre projet et non des moindres. Nouveau mélange des genres pour Paul Feig, mais cette fois il délaisse l’action et le potache pour le thriller et le suspense. Le projet attendu pour qu’il sorte enfin la tête de l’eau ou s’enfonce-t-il un peu plus dans les abyss du cinéma populaire américain sans saveur ?

Au-delà du cinéma qu’il produit et du genre qu’il met sans cesse en avant (la comédie), Paul Feig est avant tout pour ne pas dire surtout, un cinéaste qui a une identité visuelle propre à lui. Un cinéaste élégant en toutes circonstances. Que ce soit sur les photos de gala, les premières ou même sur les photos de tournage, il est habillé avec classe et élégance. Quelque chose que l’on ne retrouvait pas dans la direction artistique de ses films, mais que l’on retrouvait par déduction dans l’écriture toujours extravagante de ses personnages. Chacun des scénarios qu’il met en scène repose sur des personnages hauts en couleurs. Des personnages uniques dont on se souvient, car forts et dotés de personnalités bien tranchées, et ce, même si l’on aime pas le film. Dès la sortie du premier teaser énigmatique de cette nouvelle production, A Simple Favor semblait être LE film qui ressemblerait le plus à son cinéaste. Enfin un film plus personnel pour Paul Feig ? Un film avec des personnages hauts en couleurs, mais surtout élégamment habillés, classes et distingués. Enfin une direction artistique qui a du cachet, permettant au film d’avoir une identité propre, ainsi qu’au cinéaste de sortir de l’image du Yes Man qui enchaîne les productions conventionnelles pour ne pas dire sans âmes. Passer du subjonctif dans le texte au présent de l’indicatif, car A Simple Favor est bien à l’image de ce que les vidéos promotionnelles nous annonçaient. Entre comédie et thriller, A Simple Favor est un mélange des genres savoureux qui trouve tout son charme et son panache dans sa direction artistique. Décors, costumes, maquillages, coiffures et accessoires. Des éléments qui vont inculquer une ambiance au film, tout en développant le background caractériel de chacune des protagonistes. Elles sont deux, ne se ressemblent pas, mais pourtant vont se rapprocher et se dévoiler sous un nouveau jour. Utiliser la direction artistique afin de créer de fausses pistes et permettre à ce jeu de faux semblant (volontaire ou par impulsion humaine) de gagner en naturel. On croît à cette histoire grâce à tout ce travail sensé devenir invisible aux yeux du spectateur.

Sans ça, les personnages ne seraient que de simples squelettes reposant sur des stéréotypes du thriller à enquête. Enquête qui fondamentalement n’a absolument rien de novateur. Entre rebondissements téléphonés, invraisemblances et facilités improbables, notamment dans les réactions beaucoup trop primales des protagonistes, ce n’est véritablement pas grâce à son histoire que le film brille de mille feux. L’enrobage arrondit les contours, donne une certaine vraisemblance et de l’intérêt envers des personnages qui nous captives. Elles sont intéressantes. Tour à tour touchantes et drôles, mais surtout mystérieuses. Jamais manichéennes, simplement humaines et attachantes grâce à quelques dialogues savoureux (qui inculques au film une part de comique loin d’être négligeable, car subtile et savamment dosée et placée durant l’enquête). Qualités qui permettent au film de se rapprocher du raffinement de grands crus du genre tel qu’une belle partie de la filmographie de l’actrice Audrey Hepburn, mais entachés par des défauts qui le rapprocherait aisément d’un Fifty Shades of Grey. Choix musicaux d’une subtilité incroyable, réalisation didactique et fonctionnelle ressasse sans cesse la même manière de procéder (master puis plusieurs axes pour le champ/contre-champ et on dit merci le tournage multi-cam), ainsi qu’une mise en scène extrêmement plate qui peine à inculquer une prestance et une force (tant physique que psychologique) aux personnages. Problème néanmoins contré par un excellent choix d’actrices principales. Blake Lively et Anna Kendrick donnent réciproquement du caractère à des personnages fondamentalement opposés, formant avec naturel un duo aussi improbable que finalement logique. On y croît et le spectateur s’attache à elles avec aisance et facilité, malgré des actions et réactions qui pourraient nous faire tendres vers un tout autre sentiment.

Étonnamment attendu grâce à une campagne promotionnelle joliment menée avec une première bande-annonce mystérieuse, ainsi que de magnifiques affiches qui mettaient l’accent sur le faux semblant, les couleurs et le raffinement, A Simple Favor aura su nous combler tout en nous frustrant. Éminemment élégant, raffiné et distingué grâce à une superbe direction artistique, ainsi qu’à un duo aussi charmant que provocant, il est également peu subtile, prévisible et visuellement d’une platitude incroyable. Il manque à ce film la vision d’un auteur visuel (cinéaste et/ou d’un directeur de la photographie), aussi talentueux que peut-être John Schwartzman (dernièrement directeur de la photographie de Fifty Shades Freed). Ce dernier met en image du bon cinéma hollywoodien populaire, mais conventionnel, trop lumineux et sans réelle pâte artistique digne de ce nom. Il manque au film cette pâte artistique, ce parti pris visuel et de mise en scène qui lui auraient permis d’être plus. A Simple Favor n’en demeure pas moins une comédie d’enquête très drôle, élégante et portée par un duo féminin aussi charmant que troublant.


« Si elle n’a pas l’aura d’un Black Edwards, cette petite faveur en a la saveur et se révèle être une comédie d’enquête aussi drôle que raffinée, incarnée par un duo Blake Lively/Anna Kendrick flamboyant. »


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