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Quelques mots, sur ces œuvres que nous découvrons depuis le Québec ou la France, sur notre écran d'ordinateur ou dans notre salle de cinéma favorite.

303, le road movie estival qui va vous donner envie de croire en l’amour et l’être humain

Synopsis : « Jan est convaincu que par nature, l’être humain est égoïste. Il n’est donc pas surpris que son covoiturage pour l’Espagne le plante sans prévenir. Jule quant à elle croit que l’humain est en réalité empathique et coopératif, et n’hésite pas à le prendre en stop dans son vieux Van 303. Ensemble, ils prennent la route direction l’Atlantique… »


Les lumières de la salle de cinéma s’allument, tu te repositionnes sur ton siège pour avoir fière allure parce que la position “je m’installe comme à la maison” ce n’est pas trop ça, et là, ton ami(e) se retourne vers toi et te pose la question fatidique…

En cette période estivale, difficile de ne pas sombrer dans la paranoïa. Vouloir sortir au cinéma, c’est tomber sur les énièmes blockbusters du moment, qui aussi bons soient-ils, demeurent pour une majorité de simples blockbusters estivaux. Simples, mais aux combien efficaces. Néanmoins, en tant que cinéphiles ou simples spectateurs, on a besoin d’autre chose. On a besoin de découvrir des films originaux. Originaux, mais sans qu’ils ne racontent pour autant des histoires originales. Voir un Wild Rose, découvrir Parasite ou encore 303. Des œuvres cinématographiques qui proviennent des quatre coins du monde et qui racontent des histoires originales chacun à leur manière. Des films perfectibles, mais qui vous laissent une trace que ce soit visuelle, sonore et émotionnelle. Malheureusement, un film comme 303 a bien du mal à survivre face à la vague de films à gros budgets. Pas assez de salles prêtes à prendre des risques, pas assez de spectateurs prêts à prendre des risques, car le cinéma c’est un plaisir qui coûte excessivement cher. Une sortie cinéma c’est entre 20€ et 30€ si vous y allez avec votre conjoint. C’est cher et c’est pour cette même raison qu’il est parfois difficile de prendre un risque et donner sa chance à un film indépendant dont on n’a pas entendu parler. Alors qu’avec un blockbuster, on sait à quoi s’y attendre. Pour être transparent, c’est pour cette même raison que moi-même je n’ai pas vu les Aladdin, Men in Black International, Spider Man : Far From Home et j’en passe des meilleurs (films chroniqués par les autres rédacteurs sur le site).

Étant au Québec, c’est pour une autre raison que je n’aurais pas pu voir un film comme 303. Aucune date de sortie fixée ici, mais l’abnégation et la passion de son distributeur Wayna Pitch envers ce film a fait que j’ai franchi le pas et ai pu découvrir le film. J’ai pris deux heures de mon temps afin de laisser sa chance à 303, film allemand réalisé par le cinéaste Hans Weingartner. Une œuvre qui très certainement, à la fin de l’année 2019, devrait trôner parmi celles qui m’ont le plus touché. S’il se vend tel un road movie, dès les premières images le film 303 dévoile être en réalité une pure romance. Un homme, une femme, rapprochés l’un de l’autre par le montage alterné avant que ce ne soit physiquement par la force des choses. Effet narratif du plus simple acabit, mais amplement suffisant afin de lier les deux personnages, tout en faisant croire au spectateur que peut-être, ils se connaissent déjà. Le road movie va être la moelle épinière du récit, celle sur laquelle va venir se greffer l’histoire entre les deux personnages principaux. Une excellente idée scénaristique qui va permettre de donner du corps à chacun des personnages. Développer leur personnalité respective lors de longues discussions, tout en faisant évoluer la tension entre les deux. Tension évolutive, pour le meilleur comme pour le pire afin de démontrer qu’une relation seine et passionnelle est avant tout une relation conflictuelle, une relation où les personnes se complètent mutuellement et naturellement.

Embrasser l’aspect road movie permet également d’enchaîner les actions, situations et les paysages sans jamais sombrer dans la redondance. Les pays s’enchaînent, les paysages s’enchaînent et les personnages apprennent à se connaître au fur et à mesure des activités qu’ils vont faire ensemble. Si l’amour ne naît pas en un jour, il est beau de constater par la mise en scène et l’écriture de Hans Weingartner que ce même amour va se développer par le prisme d’actions anodines. Mettre l’accent sur des activités banales inculque au film un naturel déconcertant, qui accentue avec force et conviction l’implication du spectateur au sein de cette romance. Si les dialogues sont savoureux, superbement écrits (rarement des discussions philosophiques auront paru aussi naturelles, intéressantes et pertinentes vis-à-vis de ce que raconte le film) et permettent d’avoir plusieurs batailles verbales à double sens fascinantes entre les deux personnages, ce sont ces petits moments, ces petits riens qui représentent énormément. Ces choses auquel l’on ne penserait pas immédiatement au cinéma et qui seraient éclipsées au profit d’événements plus « extraordinaires », mais fondamentalement pertinents et importantes, car ordinaires.

Grâce à une mise en scène minutieuse, à des dialogues somptueux et à une alchimie incroyable entre Anton Spieker et Mala Emde, le spectateur se laisse entraîner, bercer et émouvoir par une romance à laquelle il croit dur comme fer. Pas de musiques extra-diégétiques, pas de facéties et d’effets grossiers de montage ou de découpage, simplement la volonté de raconter une belle histoire d’amour qui trouve l’extraordinaire dans ce qu’il y a de plus ordinaire. Un regard, un geste, un mot. Il n’y a pas besoin de grand-chose pour transcrire une tension amoureuse naissante, mais il faut trouver le bon feeling dans sa direction d’acteur.rice.s et l’écriture de son scénario. Hans Weingartner en a saisi chaque nuance, faisant de 303 un road movie romantique en ce sens parfait, car naturel et réel. La représentation exacte de l’évolution du sentiment amoureux transcrit par les possibilités offertes par le cinéma.

« Penser à la trilogie Before de Richard Linklater est une évidence. Rarement le sentiment amoureux n’aura été si bien saisi, transcrit au cinéma avec tant de beauté et de naturel. »

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